La doctrine manichéenne

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La doctrine manichéenne par Palans Eques. 

La doctrine manichéenne a révélé tous ses éclats grâce aux manuscrits de Nag Hammadi.

Introduction au dualisme manichéen

Le dogme manichéen peut se définir comme un dualisme radical. Inspiré du mazdéisme, et du combat éternel entre Ormuzd et Ahriman, Mani place à la source de l’Univers, le principe de lumière, incarné par le « Père de la Grandeur » (Zurvan, Waishtaw en Persan, l’Ahura Mazda des zoroastriens) en radicale opposition avec le principe des ténèbres, le « Prince des ténèbres » (Ahriman du mazdéisme). « Dieu » et le « Diable » sont d’égale puissance à l’origine et entièrement séparés par un abîme sans nom. L’un et l’autre ne sont pas émanés d’une seule source commune, ce qui en reviendrait à un monisme : « Bienheureux celui qui connaît les deux arbres et les sépare l’un de l’autre, et qui sait qu’ils ne sont pas nés l’un de l’autre, issus l’un de l’autre, et qu’ils ne sont pas non plus sortis d’une seule souche. » (Mani, Kephalaia). En soi, le principe de lumière représente l’esprit, et le principe de ténèbres, la matière.

Les mondes et ses habitants

Le monde de la lumière contient en lui des éons et principes innombrables, incarnés chacun par un dieu, il s’étend sans limites vers le nord, l’ouest, l’est et le haut. Sa substance est faite de 5 éléments spirituels : l’éther, la lumière, le feu, l’air et l’eau (respectivement : frawahr, roshn, adur, wad et ab). Le Père de la grandeur est époux du « Grand Esprit », une déesse nommée en persan « Waxsh zindag » ou « Waxsh yozdahr ». L’enfer, lieu de chaos, de désordre matériel, qui s’étend vers le sud et vers le bas est divisé lui en cinq royaumes, fait des 5 éléments ténébreux (quatre éléments corrompus, ténèbres à la place de la lumière, l’eau est poison, le feu qui chauffe devient le feu qui brûle…etc.). Chacun des royaumes comprend cinq gouffres, cinq arbres ténébreux, cinq rois ou archontes (à forme de démons bipèdes bisexués, de lion, d’aigle, de poisson et de dragon), cinq métaux (or, cuivre, fer, argent, étain), cinq goûts (salé, aigre, acre, fade, amer) et cinq catégories d’êtres infernaux (démons, quadrupèdes, oiseaux, poissons, reptiles)…etc. Le Prince des ténèbres combine en lui tous ces attributs, et personnifie la matière ou sa première manifestation.

La guerre cosmique, la première émanation

La guerre entre la lumière et les ténèbres a commencé lorsque le Prince des ténèbres s’est retrouvé par hasard à la frontière du paradis. Alors emplis de convoitise et de jalousie, il revint dans son royaume pour constituer une armée et envahir les jardins de lumière. Pour protéger son royaume, le Père de la grandeur a commencé à émaner les différents dieux du manichéisme. Il créa alors la Mère de la vie (Madar i zindagan) qui à l’aide des éléments spirituels, façonna le premier homme (Ohrmizbay). Il fit de ses fils, les cinq éléments (Mahraspandan), une armure terrible pour contrer les puissances démoniaques. Mais pour cesser la colère des ténèbres et son invasion, il du la sacrifier et la jeter entre les mains de l’ennemi. Une partie de la lumière fut alors prisonnière de la matière. Dévorées et absorbées par les ténèbres, ces particules de lumière en vinrent à oublier leur essence divine et à devenir indépendantes de la matière.

La défaite du premier homme et son salut, la seconde émanation

Le premier homme, alors accablé par la défaite sur le champ de bataille et prisonnier lui aussi de l’enfer, implora l’aide de la mère divine, qui touchée par son appel de détresse, implora le Père de la grandeur de l’aider. Celui-ci entreprit donc la création d’autres dieux pour son aide : l’Ami des lumières (Roshnan xwarist), dont la fonction est méconnue, le Grand architecte (Nogshahrafur yazd), et l’Esprit vivant (Mihr yazd). L’esprit vivant se rend alors au bord de l’abîme et pousse un appel. Et le premier homme répond. Le jeu d’appel et de réponse entre le premier homme et l’esprit vivant, invoque aussi d’autres entités, les cinq fils de l’Esprit vivant : le garde de la splendeur, le roi de l’honneur, l’Adam de lumière, le roi de la gloire, et Atlas, celui qui soutient. Progressivement, le premier homme se souvient de son essence divine et s’échappe de l’enfer pour regagner les jardins de lumière. Ce souvenir et sa réintégration dans le royaume du Père de la gloire serviront alors de modèle pour le rachat des âmes, prisonnières de la matière.

La création du monde, la troisième émanation ou processus de rédemption

L’Esprit vivant, après avoir délivré le premier homme, part alors en conquête du royaume des ténèbres. Il défait les démons et fait de leur corps, huit terres, et de leur peau, dix cieux. Il fait d’une partie de la lumière délivrée, le soleil et la lune, et de la partie de lumières instables, les étoiles, placées dans le onzième ciel, celui vu par la terre. Pour la rédemption de la lumière maintenue par la matière, il crée trois roues, celle du feu, de l’eau, et du vent, commandées par le roi de la gloire. Le gardien de la splendeur gardera les dix cieux et Atlas, sur la cinquième terre, soutiendra les trois terres supérieures. À ce stade de la création, le monde est immobile et sans vie. Les ténèbres sont mêlées à la lumière, le soleil se tenant toujours dans le ciel. Le père de la grandeur entreprend alors la troisième création : l’émanation des dieux du salut. Le premier de ces derniers sera le Troisième messager (Narizah Yazd). Puis il évoque la Demoiselle de la lumière (Kanig Roshn), qui apparaîtra aussi sous la forme de 12 vierges. Ceux-ci se présentent nus devant les archontes enchaînés aux cieux. Les archontes mâles éjectent alors leur semence en les voyant, qui tombe sur la Terre et permet à la lumière d’intégrer leur corps respectifs. Une partie de celle-ci tombera dans les océans pour former un gigantesque monstre marin ; celle tombée sur la terre ferme créera les arbres et les plantes. Les archontes femelles avorteront d’une substance qui peuplera la terre des 5 genres de créatures vivantes, correspondant aux cinq espèces de démons. Le grand architecte (de la deuxième vague de création de dieux), entreprend la construction du nouveau paradis, ou nouvel éon, de même substance que les jardins de lumière, mais d’existence séparée du véritable Éden, lieu transitoire où les âmes rachetées, évadées des ténèbres, pourront se reposer pendant la lutte cosmique. En effet, le paradis éternel doit rester isolé du conflit. Le gouverneur du nouvel éon sera le premier homme. La troisième divinité de salut est la Colonne de gloire (Srosh-ahray), canal par lequel la lumière rachetée peut remonter au nouvel éon. Elle est symbolisée par le lait. Sur le chemin sacré, les âmes passent tout d’abord par la lune, puis par le soleil, pour accéder au paradis transitoire. Les dernières émanations du salut sont respectivement : Jésus la splendeur (Yosho Ziwah), le grand Noûs (Wahman) ou Esprit saint (composé de 5 attributs : Esprit, pensée, réflexion, intelligence et raison) et la Justice juste. Les trônes divins sont distribués dans la création, sur la lune et sur le soleil : Le troisième Messager, la Mère de la vie, et l’Esprit vivant, sur le soleil ; et Jésus, la Demoiselle de lumière, et le Premier homme sur la lune. Les deux astres sont mis en mouvement par le troisième messager, les phénomènes naturels (la pluie, la rosée, etc.) et les changements de saisons seront le renouvellement nécessaire au rachat de la lumière.

La naissance des hommes

Pour déjouer ce processus de rédemption, la matière enverra alors deux grands démons (personnification du désir et de l’avarice) pour dévorer la progéniture des animaux sur Terre, et ainsi absorber toute la lumière qu’ils contiennent. Les monstres s’accouplent et enfantent ainsi Adam et Eve, à l’image de leurs homologues de lumière, aperçus par leurs parents démoniaques dans les cieux : le troisième messager et la demoiselle de la lumière. La lumière accumulée dans leur corps forme leur âme. L’âme divine, lumière pure, est ainsi mêlée à l’âme obscure, le corps de l’homme, créé par la matière et composée de sentiments négatifs : la convoitise, l’avarice, l’envie, la haine…Le Prince des ténèbres s’assure alors que l’humanité se multiplie, de façon à conserver une prison durable pour une partie de la lumière alors conquise. Cependant, Jésus de splendeur descend, et rappelle à Adam l’origine de son âme, comme l’esprit vivant l’a fait avec le premier homme. Adam décide alors d’une vie chaste. Mais Eve sera séduite par le démon à qui elle livrera Abel et Caïn. Plus tard, elle soutiendra Seth. L’esclavage de l’homme sera ainsi perpétué.

Le salut de l’âme

La lumière qui compose l’âme ne peut pas être physiquement rachetée. Son salut dépend de l’effort de prise de conscience de son origine. Il ne s’agit pas de transformer, mais de reconnaître, de se souvenir de sa nature divine, et ainsi d’accéder par la colonne de gloire au paradis transitoire. Pour aider les hommes dans leur quête d’origine, le Grand Noûs enverra les prophètes sur Terre, insufflant la gnose aux descendants d’Adam, comme Jésus de splendeur l’a fait avec Adam lui-même On distingue parmi cette chaîne d’envoyés : Seth, Enoch, Nicothée, Noé, Sem, Abraham, Zoroastre, Bouddha, Jésus et Mani lui-même. Avec la connaissance, vient la volonté de salut, mais la matière cherche toujours à submerger l’âme dans l’oubli, dans le « sommeil de l’ivresse » comme L’appellera Mani. L’âme dormante sera surnommée « le vieil homme », l’âme éveillée, « le nouvel homme » (image prise de Paul). Étant elle-même lumière, donc essentiellement bonne, le péché ne sera perçu que comme un oubli, une faiblesse à résister à l’âme obscure, « le cadavre du corps », dans laquelle est enfermée l’âme lumineuse. La doctrine manichéenne est réincarnationniste. L’âme suit un cycle d’incarnation successive avant d’être dégagée définitivement de la création par l’illumination et l’accomplissement de la vertu. A la mort, il y a deux chemins possibles pour la lumière de l’âme : celle-ci se rend auprès de la justice juste (émanée de la troisième création) qui décide de son retour dans le mélange chaotique du monde, de sa chute définitive en enfer ou de son ascension vers le nouvel éon. Le deuxième chemin concerne les élus : l’âme arrachée du corps rencontre un des dieux du salut, accompagné de trois anges lui transmettant les insignes de la victoire (une couronne, un diadème et une robe de lumière). Après les avoir reçus, elle monte au nouvel éon par la colonne de gloire, la lune et le soleil.

La fin des temps

La fin des temps sera présagée par une grande guerre, période de conflit et d’amertume, ou la majeure partie de la lumière aura été tirée hors du monde. De là, Jésus établira son règne et son jugement. Il séparera définitivement la lumière des ténèbres, la justice de la prévarication. Dès lors, les dieux soutenant le cosmos abandonneront leur siège, les cieux et les terres s’effondreront, un grand incendie éclatera, par lequel les dernières particules de lumière seront libérées et montreront au nouveau paradis. Le royaume de la matière sera scellé avec une grande dalle, et finalement, le nouvel éon sera joint aux jardins de lumière. Les âmes dans l’attente retrouveront alors la face perdue du Père de la grandeur, voilée depuis le commencement de la lutte.

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