Rencontre avec Amorgen

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Rencontre avec Amorgen. 

Pourrais-tu nous donner une petite définition de la WICCA ?

Le courant auquel je me rattache pourrait s’appeler la Wicca initiatique, qui s’efforce de suivre la voie qu’avait lancé son fondateur Gérald Gardner.

Qui dit Wicca initiatique dit initiation, et dans la tradition à laquelle j’appartiens, pour être Wiccan il faut être initié. Nous avons donc une cérémonie d’initiation qui vous fait entrer dans la Wicca. Si je devais en peu de mots définir la Wicca, je dirais que c’est un ordre initiatique de sorcellerie et de paganisme. On assiste aujourd’hui à de nombreux débats afin de savoir si Gérald Gardner a créé la Wicca de toutes pièces ou s’il s’est contenté de réactualiser et de réaménager un matériau plus ancien. Il prétendait effectivement, et dans l’état actuel des connaissances que l’on a de l’histoire de la Wicca, c’est probable sans être certain, qu’il avait été initié dans un coven de sorcières à New Forest. Estimant que le matériel transmis était incomplet, il a utilisé ses connaissances personnelles (il était un folkloriste amateur d’un assez bon niveau), pour enrichir ce matériel d’un certain nombre de choses. On retrouve en effet beaucoup d’influences dans la Wicca et de nombreuses pistes qui ont conduit à sa construction. Pour résumer ces influences, on retrouve bien entendu tout le folklore britannique, le folklore païen celtique, les fêtes ainsi que les divinités celtiques en particulier, une partie des rituels sont issus de la magie cérémonielle du type Golden Dawn ou de ce qu’a pu faire Aleister Crowley, on reconnaît les influences de Crowley dans certains écrits de Gardner. Mais aussi la franc-maçonnerie pour les outils et l’avancement en grades, etc. Enfin la poésie de Kipling, le Tantra, le Yoga, car Gardner a passé de nombreuses années en Malaisie, en Inde…. Il a attendu l’abolition de la loi anglaise qui punissait les sorcières et tout a commencé quand il a publié un premier livre, sous forme de fiction, qui s’appelait « Hight Magic Aid », puis le fameux « Witchcraft today » qui a été le point de départ de la « vulgarisation » de la Wicca.

J’ai entendu parler des Gardneriens, Alexandriens, Children of the Light, la Magick, ces mouvements se rattachent-ils à la même tradition ?

La Wicca se caractérise par l’absence absolue de dogme, de hiérarchie centrale, et de structure. C’est un système initiatique, mais à partir du moment où une personne a été initiée, a suivi son parcours jusqu’au troisième degré, elle est totalement indépendante. Elle fait ce qu’elle veut de ce qu’elle a reçu, elle peut continuer à travailler toute seule, elle peut fonder un coven, enrichir la tradition à laquelle elle appartient ou en créer une nouvelle si elle le souhaite.

On retrouve ainsi une myriade de traditions, certaines ont gardé cet aspect initiatique, d’autre ont totalement échappé à la sphère initiatique, elles sont ce que l’on appelle des traditions éclectiques ou spontanées, nées de personnes qui ne voulaient pas entrer dans des systèmes trop hiérarchiques avec des degrés, ou trop fermés, des gens qui voulaient être beaucoup plus libres. Ces traditions éclectiques se retrouvent plus particulièrement aux États-Unis, bien souvent influencées par des traditions folkloriques, et bien qu’ayant gardé le nom de Wicca, elles n’ont plus grand-chose à voir, mis à part les principes fondamentaux, avec la Wicca originelle. En ce qui concerne les traditions anglaises, la Wicca Alexandrienne est du nom de son fondateur, Alex Sanders. Une polémique a couru qu’il aurait volé le Livre des Ombres d’une prêtresse de Gardner, c’était beaucoup de publicité pour pas grand-chose, il a en fait été initié par une prêtresse de Gérald Gardner et a fondé sa propre tradition. Une tradition beaucoup plus axée sur la magie cérémonielle, beaucoup plus magique, beaucoup plus ritualiste. Les Children of the Light est une toute petite tradition fondée par Anthony Kemp, qui est, elle aussi une tradition initiatique, mais avec un corpus de rituels un peu différents des nôtres.

On trouve plus de différences entre les traditions initiatiques et les traditions dites éclectiques. Beaucoup de pratiques qui paraissaient probablement « politiquement incorrects » aux éclectiques, comme la flagellation rituelle, ont été complètement supprimées, afin de donner de la Wicca une image plus acceptable pour l’opinion publique. Même si certains détracteurs de la Wicca ironisent sur les aspects sado-masochistes de ces pratiques cela n’a rien a voir. La flagellation rituelle est quelque chose de rare et qui n’est pas douloureux.

C’est pourquoi aujourd’hui le mot Wicca englobe une multitude de courants. Quant à moi, je suis de filiation gardérienne, et même si en France nous avons relativement peu de supports, j’essaie de suivre cette tradition. J’ai heureusement des contacts outre-Manche qui peuvent m’aider d’un point de vue documentaire.

Peux-tu, et as-tu le droit nous expliquer comment se passe un rituel wiccan ?

Certains oui, d’autres non, effectivement les traditionalistes ne vouent pas un culte au secret, mais ont fait vœux de silence sur leurs pratiques rituelles.

Nous fêtons huit sabbats dans l’année, ces sabbats ont gardé les noms celtiques. Les wiccans célèbrent aussi les esbats, chaque pleine lune, mais rien n’interdit de célébrer un esbat en lune croissante ou en lune décroissante. Mais traditionnellement les esbats se font principalement à la pleine lune, car la lune est le symbole principal de notre Déesse, la Wicca donnant une certaine prédominance à la Déesse par rapport au Dieu. Les sabbats représentent la roue de la vie, nous faisons un parallèle entre la roue des saisons, la roue de la vie et notre propre cycle. Nous associons donc à chaque sabbat une symbolique particulière qui sera fêtée de différentes manières. Par exemple nous faisons des feux à Beltaine, à Samhain quand le monde des morts et le monde des vivants s’entrecroisent, nous fêtons nos morts, nous aurons des pensées particulières pour ceux qui sont passés dans le Summerland, le Pays de l’Eté. Je pense qu’à ce niveau il y a de nombreux points communs avec les pratiques druidiques. La cérémonie de l’esbat sera plus axée sur la magie opérative, nous allons alors profiter de la pleine lune, qui représente pour nous un symbole de plénitude et un « pic » d’un point de vue magique, c’est le moment le plus adéquat pour travailler. Nous tentons lors des esbats de faire des rituels de guérisons par exemple. Pour moi (je dis pour moi, car tous les wiccans ne sont pas de cet avis) la magie à beaucoup à voir avec la psychologie et c’est quelque chose qui est avant tout personnel et qui sert d’outil de transformation personnelle. Je ne me vois pas, dans mon Cercle agiter ma baguette magique pour séduire la fille de ma concierge !

Peux-tu nous donner ta conception du mot « magie » ?

D’une manière très générale, pour moi il existe deux types de « pratiques magiques ». Une pratique qui va s’apparenter plus à l’utilisation de la prière, et d’un focus matériel pour résoudre un problème ou une situation. Ce sont plus particulièrement les problèmes de santé ou nous allons utiliser les propriétés des plantes par exemple en plus de notre volonté et de la prière, afin d’obtenir une action donnée. Ce peut donc être une action de guérison, pour favoriser quelque chose, etc.

Et puis il existe toute une magie, qui effectivement est intimement liée au parcours initiatique de chacun, une ritualisation de certaines étapes de la vie, de l’homme ou de la femme qui s’inscrit dans cette tradition, et qui vont être des rituels de connaissance de soi, que l’on fera par rapport à des psychodrames (j’utilise un terme volontairement psychologique parce que c’est peut être le plus aisé à comprendre), de manière à essayer de mieux se connaître (connais-toi toi-même et tu connaîtras l’Univers et les Dieux ! ). Nous essayons donc d’approfondir cette connaissance de nous même pour accéder quelque part à un certain équilibre, à une harmonie, qui tant que l’on n’est pas parvenu au bout du chemin, nous touchons du doigt cette harmonie pendant certains instants sacrés ou magiques. En pleine nature, il arrive fréquemment que devant un paysage merveilleux nous ayons l’impression de ne faire plus qu’un avec l’Univers, ou dans un Cercle avec ses frères et ses sœurs en train de célébrer la même chose, de prier, on va vivre des instants très forts. Nous avons donc toute une série de pratiques magiques qui vont nous permettre d’avancer sur ce chemin, par la méditation, des exercices de respiration, par la visualisation aussi. Chaque étape de cette connaissance de nous même correspond aux trois degrés d’initiations. Le premier degré correspond à l’ouverture du chemin, la découverte de la Déesse et du Dieu, avant de rentrer sur le chemin, le chemin est devant soi. Le deuxième degré : un auteur wiccan anglais qui est psychothérapeute l’expliquait en termes un peu psychologiques mais très intéressants, c’est la descente dans son moi obscur, pour voir un peu ce qui se passe à l’intérieur et comment il est possible de progresser encore. Le troisième degré serait la réconciliation enfin entre l’animus et l’anima.

Voici, en ce qui concerne la magie, deux types de magie, une magie très personnelle, même si certains vont utiliser les mêmes outils ou des rituels très approchants, qui visent à se connaître, et puis une pratique qui tient plus de la magie opérative ou de la magie des simples, qui consistera effectivement à associer sa volonté, l’action de la prière, le changement d’état de conscience parfois et un focus matériel dans un objectif précis.

Vous ritualisez nus, vous utilisez la flagellation ?

La flagellation est utilisée uniquement pour changer d’état de conscience, une flagellation bien faite, c’est-à-dire ni trop forte, ni trop douce, est comparable à un rythme de tambour, sauf que le tambour c’est la peau. Cela provoque un échauffement du corps, enfin le rythme des lanières sur le corps, associé au décor dans lequel on se place pour ritualiser (la fumée de l’encens, les bougies, l’obscurité ou le temple de la nature), participe à nous faire basculer dans une conscience plus sacrée de ce que l’on fait et nous faire quitter le monde profane dans lequel on se débat tous les jours.

Le fait de nous dénuder nous permet aussi de changer d’état de conscience, c’est-à-dire que l’on s’offre à la Déesse et au Dieu, on est fiers d’être comme on est, nous n’avons pas besoin de mettre plein de bijoux, des oripeaux comme certains magiciens cérémoniels, des grandes robes brodées, etc. Nous appelons cela être « vêtus de ciel », ce qui est très poétique, et c’est aussi montrer une certaine démocratisation, on est tous pareils, dans un cercle on est tous beaux et il n’y a pas de différences sociales dans un cercle, on est tous frères on est tous sœurs. L’uniforme de tous les jours on le laisse derrière. Nous utilisons tout ce qui peut nous aider à changer d’état de conscience : les encens, la lumière des bougies, la musique bien sûr, et quand on a la chance d’avoir des frères et sœurs musiciens, les tambours en particulier, c’est encore plus joli. Nous avons d’autres outils, la baguette bien sûr, l’athamé, qui est une dague rituelle que l’on utilise pour ouvrir le cercle, le chaudron de la sorcière qui est un symbole intéressant, certains utilisent un balai, le fameux balai de la sorcière, les encensoirs, les cordes ….

Quels sont vos Dieux ?

J’ai toujours du mal à parler des Dieux dans la Wicca, on se rend compte que chaque wiccan a une vision des Dieux différente. Et pourtant, nous arrivons à pratiquer et à célébrer ensemble.

Certains wiccans sont strictement polythéistes, c’est à dire que pour eux chaque Dieu est différent et possède un rôle, une sphère d’influence et une sphère d’activité bien particuliers. D’autres sont duo théistes, c’est à dire tous les Dieux ne sont qu’un : le Dieu, toutes les Déesses ne sont qu’une : la Déesse, c’est La Déesse et Le Dieu. D’autres enfin sont un petit peu un mélange des deux, ils vont s’adresser en majorité à la grande Déesse et au Dieu cornu, mais en même temps ne pas négliger le fait que l’on ne s’adresse pas à la Morrigane comme à une autre Déesse. Même si toutes les Déesses vont se retrouver dans un archétype qu’ils appellent tous la Grande Déesse, et la Grande Déesse, chez les wiccans, est célébrée sous ses trois aspects : la vierge, la mère et la vieille. Et le Dieu cornu sous deux aspects principaux : le Dieu de la fertilité et le Dieu de la mort, que l’on appelle l’homme en noir. Mais il y a toujours une prédominance pour la Déesse.

Tu dis toujours le Dieu et la Déesse, tu ne donnes pas de nom ?

Dans ma pratique personnelle, le Dieu c’est Kernunnos, quelquefois Pan, toujours une divinité cornue, j’ai beaucoup de fascination pour l’image de ces Dieux, mais c’est principalement Kernunnos.

Pour les Déesses, c’est plus difficile, mais j’ai une certaine préférence pour les Déesses celtiques : Morrigane, Dana ou Brigit. Personnellement je nomme moins la Déesse que le Dieu. Quand je la nomme, c’est parce que je vais m’adresser à une déesse particulière, c’est d’ailleurs souvent la Morrigane car j’ai une affection particulière pour elle.

Il existe une image de la Wicca qui la rattache au satanisme ?

En France la Wicca a toujours eu du mal à s’implanter, on connaît l’esprit particulier des français vis-à-vis des religions, il y a toujours eu des traditions sorcières dans les campagnes qui se rattachaient à ce que j’appelle « la sorcellerie de campagne ». C’est connu dans le Berry par exemple, et il existe des occultistes, qui, parce qu’ils avaient une bonne connaissance de ce qui se passait dans notre pays, ont vu le développement de la Wicca en Angleterre et aux États-Unis dans les années 70, et s’estimant eux même païens, ont voulu s’approprier le nom de Wicca. Ce n’était pas difficile étant donné qu’il n’y a aucune structure dans la Wicca. Je pense en particulier à deux personnes assez célèbres dans le petit milieu ésotériste français, Jack Coutela avec sa femme Diane Luciféra et Yull Rugga (un nom un peu celtique qui veut dire je crois hiver rude).

J’ai rencontré Jack Coutela avec sa femme à l’époque où j’avais entendu parler pour la première fois de la Wicca et où je cherchais des wiccans, ce que j’ai vu m’a semblé n’avoir rien à faire avec la Wicca. Ces personnes faisaient de gros mélanges entre satanisme, luciférianisme et Wicca. De Wicca ils avaient gardé le nom, la nudité rituelle, du satanisme ou plutôt de la démonologie ils avaient gardé ces noms des innombrables démons médiévaux dont sont farcis les grimoires de sorciers de l’époque, et du luciférianisme cette espèce d’esprit prométhéen qui veut que le « magicien » soit celui qui impose son pouvoir aux Dieux, dans l’optique de gagner plus de pouvoir et de puissance. Des gens comme les wiccans en règle générale, ont pour objectif de se fondre dans la Divinité, l’objectif des voies de la main gauche occidentale, que je différencie des voies de la main gauche orientale qui n’a rien à voir, veulent eux devenir Dieu. En ce qui concerne Jack Coutela et Diane Luciféra, ils étaient des « gogos », qui avaient probablement une certaine érudition en matière occulte, mais qui faisaient cela pour s’amuser ou parce qu’ils s’ennuyaient probablement dans leur pavillon du Kremlin-Bicêtre. On tournait en rond en récitant des litanies de noms de démons, en faisant à peu près n’importe quoi, ils se préoccupaient plus d’étudier la Bible pour y déceler des failles que de se réaliser eux même. Ces gens-là ont, je pense fait beaucoup de mal au nom de la Wicca. Yull Rugga était plutôt luciférien, il se disait de la Wicca occidentale, mais il professait ouvertement des idées d’extrême droite, il avait une grande érudition occulte, mais il pratiquait quelque chose qui n’avait rien à voir avec la Wicca, même s’il avait été initié par des wiccans dans un autre pays d’Europe. Visiblement ils n’auraient pas apprécié ce qu’il en a fait par la suite. Principalement ces deux personnes, ainsi que certains en Belgique, ont participé à la confusion entre le luciférianisme et la Wicca, au point que ces gens-là ont fondé une tradition qui s’appelle la Wicca luciférienne et qui n’a rien à voir avec la Wicca anglo-saxonne. En Belgique un institut propose toujours des initiations au satanisme, au luciférianisme et à la Wicca luciférienne. La Wicca n’a rien à voir avec le satanisme, tel qu’on le conçoit de nos jours qui est tiré des écrits de Anton Zandor LaVey, cela n’a rien de religieux, c’est plutôt philosophique et c’est une voie qui convient très bien aux égoïstes de tous poils.

On ne peut pas nier non plus que la Wicca a beaucoup été influencée par le satanisme littéraire du XIX eme siècle. L’utilisation du mot « sorcier », le côté secret …..

Je voudrais ajouter que l’association wicca et satanisme vient pour beaucoup de ces personnages, mais peut être aussi du fait que la Wicca reconnaît le côté sombre de l’homme et l’intègre dans son culte. Et c’est peut-être mal compris de l’extérieur. Par ailleurs, il ne faut pas non plus donner une vision aseptisée de la Wicca. Je pense que la Wicca initiatique n’a pas vocation à être une religion de masse. C’est un culte ésotérique, c’est un peu cela qui m’avait attiré, que des gens utilisent la rituelle Wicca pour faire des cérémonies en public c’est très bien, mais ce n’est pas la même chose que la Wicca initiatique. C’est une branche cousine plus ouverte vers l’extérieur, capable de faire de grandes fêtes avec des gens qui ne sont pas forcement païens, c’est bien, c’est renouer avec des cycles de la vie, mais ce n’est plus la même chose.

Quel a été ton parcours ?

Au départ ma fascination pour les Celtes. J’ai toujours été fasciné par l’histoire en règle générale quand j’étais enfant et plus particulièrement les Grecs (c’était le plus facile car je pouvais trouver tout les livres que je voulais) et les Celtes dont je trouvais terriblement injuste que l’on ne dise rien dans les livres d’histoire sur les Gaulois. Et j’ai été très heureux de découvrir que les Gaulois n’étaient si barbares que cela, qu’ils avaient inventé le tonneau, plus pratique que les amphores, qu’ils avaient développé un système de moissonneuse, ils avaient inventé le savon …. Tout cela avait nourri mon inconscient d’enfant et d’adolescent et en étudiant ensuite la mythologie celtique, qui n’est pas vraiment la plus simple, chez les Grecs tout est bien ordonné, structuré mais chez les Celtes c’est bien différent, mais fascinant. Je trouvais en plus que les figures mythologiques celtiques assez truculentes pour certaines, pleines de vie, avec une symbolique encore vivante de nos jours, je trouve extraordinaire le personnage du Dagda, c’est un de mes Dieux celtiques préférés.

De fil en aiguille, avec je pense une propension à avoir une imagination développée et à être fasciné par tout ce qui est caché, je suis venu à m’intéresser à l’ésotérisme, au paganisme et à essayer de collecter le plus d’informations possible. J’ai donc découvert un jour un livre d’un personnage qui est un vulgarisateur de l’occulte américain, traduit en France, qui s’appelait « Les nouvelles sectes païennes », où l’on trouvait des sectes totalement délirantes, mais aussi des choses plus intéressantes, dont la Wicca. Je me suis rapidement rendu compte qu’en français on ne trouvait pas d’ouvrages sur la Wicca. Si je voulais me renseigner je devais passer par des voies détournées, à savoir la mythologie celtique et les livres de Leroux/Guyonvarc’h, puis j’ai rencontré les Coutela qui ont mis un coup d’arrêt à mon intérêt pour la Wicca pour quelques années, et j’ai cherché quelque chose de plus « celtique ». J’ai donc écrit à un certain nombre de groupements celtiques, mais aucun ne m’a répondu ! J’ai été très déçu et je me suis fait mon petit paganisme durant quelque temps.

Un jour, par le plus grand des hasards j’ai croisé la route de celle qui allait devenir mon initiatrice, qui était une femme qui vivait dans les Ardennes, et qui se définissait comme étant une sorcière et wiccane. Elle était d’origine irlandaise, mais vivant en France. Nous avons eu une correspondance pendant un certain temps, puis nous nous sommes rencontrés et cela a été ce que l’on pourrait appeler un coup de foudre spirituel. J’ai tout de suite su et vu que cette femme allait m’apporter beaucoup et que c’est elle qui allait me mettre sur le chemin. Elle parlait extrêmement bien l’anglais et possédait donc des livres wiccans en anglais, c’est elle qui m’a initié à la wicca, j’ai pris la décision de tout lâcher pour aller habiter chez elle pendant un an, comme un apprenti à l’ancienne. J’ai donc baigné là-dedans pendant un an, cela m’a beaucoup apporté et donné pas mal de connaissances, j’ai travaillé sur le savoir-faire et le savoir être et j’ai vraiment compris que c’était le chemin qui me convenait. La vie étant ce qu’elle est et ne pouvant rester sans travailler plus longtemps qu’un an, je suis revenu sur Paris pour travailler et pour reprendre une pratique solitaire, puisqu’à l’époque, sans internet je ne connaissais aucun wiccan en région parisienne. J’ai travaillé seul pendant quelque temps jusqu’à ce que certains éléments de ma vie me fassent mettre ma spiritualité entre parenthèses, pendant environ cinq ans. Pendant ces cinq ans, je n’ai eu qu’une spiritualité de façade où je ne célébrais plus que de manière épisodique et très superficielle. Je me sentais toujours païen au fond de mon cœur, mais on ne peut pas dire que je travaillais véritablement sur moi et que je célébrais ma religion. D’autres évènements on fait que j’ai repris contact avec ma spiritualité. J’ai eu l’impression de me retrouver, comme quoi on a quelques fois besoin de passages à vide pour mieux se retrouver ensuite, j’ai eu la chance d’avoir internet à la maison et le premier mot que j’ai tapé dessus c’était wicca. Et là surprise, mais l’émerveillement a été de courte durée étant donné ce que l’on trouve sur internet, le pire et le meilleur. J’ai malgré tout réussi à entrer en contact avec les personnes de Tours, qui eux connaissaient déjà Anthony Kemp des Children of the Light, et nous avons pratiqué ensemble, ils m’ont ré-initié de manière à marquer mon entrée dans la tradition gardnérienne, puisqu’avant j’étais un solitaire sans tradition, et cette année j’ai été initié au deuxième degré. Je poursuis maintenant dans cette tradition, je pense pour longtemps.

Quels conseils donnerais-tu à ceux qui seraient attirés par cette voie ?

D’être sûrs d’eux déjà, ce n’est pas une voie facile, ce n’est pas une école, aux États-Unis on leur donne des devoirs à faire, une masse de connaissances à digérer et ensuite on leur pose des questions, ce n’est pas du tout ma manière de voir les choses. Si quelqu’un vient me voir en me demandant de l’aider pour trouver cette voie, je me définirais plus comme un coach, comme un guide, sans aucune prétention, car j’ai encore beaucoup de choses à apprendre et je ne suis vraiment pas au bout du chemin, mais je dirais « Tu peux peut-être t’intéresser à cela, creuser plus particulièrement ce sujet », indiquer des directions. Je pense qu’il y a une phase qui consiste en l’ingestion de connaissances, on ne peut pas y échapper, où il faut se renseigner par soi-même. Il faut étudier la mythologie, se poser des questions : « Qu’est-ce qui me frappe dans la mythologie ? Qu’est-ce qui résonne en moi ? Est-ce que, quand on me parle des mystères d’Eleusis, est-ce que cela évoque pour moi quelque chose d’encore vivant ? » . Je pense qu’il y a d’abord toute cette phase, ensuite le côté magique, certains sont attirés vers l’herboristerie, il faut foncer : on trouve en France des ouvrages de véritables herboristes et il faut les connaître.

Le conseil que je pourrais donner, c’est garder un esprit critique par rapport à tout ce qu’on lit, car il y a quand même beaucoup d’imbécillités qui sont publiées, essayer de se forger sa propre opinion, et si l’on est sûr que l’on veut être wiccan, par rapport à ce qu’on a lu, par rapport à ce que l’on sent en soi, on peut alors chercher à rencontrer quelqu’un. Si l’on rencontre quelqu’un, il faut toujours garder cet esprit critique : « Est-ce que je me vois travailler avec cette personne-là, est-ce que je pense que cette personne va m’apporter quelque chose, est-ce que je me sentirai bien à pratiquer avec cette personne ».

Aurais-tu une mise en garde à donner ?

Oui, je ne conseille pas la Wicca aux mineurs ! Je pense qu’il faut déjà avoir une personnalité bien forgée, un certain équilibre. Effectivement, comme on travaille sur la connaissance de soi, on découvre parfois des aspects de soi-même qui ne sont pas reluisants, que l’on avait essayé pendant des années de se camoufler et de mettre en lumière des côté de soi que l’on aime pas parce que l’on veut apprendre à les gérer, ce n’est pas forcement facile. Je dirais que c’est une voie que l’on doit ressentir en soi, dans sa tête et dans ses tripes et qu’il faut se sentir prêt à vouloir bousculer ses idées reçues, ses préjugés, ses a priori, sur beaucoup de choses : sur soi-même, sur les femmes, sur les hommes, sur la vie en général, sur sa place dans l’ordre du monde.

Je me considère toujours comme un débutant et ce sont les conseils que je me donne à moi-même, garder mon esprit critique, on ne me fera pas avaler n’importe quoi.

Je suis wiccan dès que je me lève le matin, j’ai parfois du mal à le concilier avec le monde dans lequel je vis, avec mon métier, parce qu’au bout d’un moment on finit par faire le tri dans ses connaissances et dans ses « amis ». On s’aperçoit qu’il y a des gens à qui l’on a plus rien à dire, de même qu’aux relations de travail superficielles que l’on peut avoir, on cherche des relations plus vraies avec les gens, j’ai eu une période où j’avais du mal à concilier vie professionnelle et vie spirituelle parce que j’avais du mal à communiquer avec mes semblables. Et cela peut être déstabilisant pour quelqu’un de jeune et pas tout à fait préparé, de se sentir différent des autres, d’être marginalisé.

Y a-t-il quelque chose que tu voudrais ajouter ?

Je voudrais dire simplement que la Wicca est une des rares voies authentiquement « féministes », où l’on essaie d’envisager les choses, pour les hommes en acceptant leur part féminine, et pour les femmes, dans un cercle le « leader » c’est la prêtresse. Ce n’est pas une simple inversion du patriarcat, mais on estime qu’il est temps d’un point de vue spirituel, on se rapproche là du Tantra, d’essayer autre chose que ce vieux patriarcat que l’on a usé jusqu’à la corde depuis quelques milliers d’années, et qui nous conduit à ce que l’on voit autour de nous, c’est-à-dire un monde qui va mal, qui a mal, une Terre qui souffre, qui s’empoisonne, des gens qui ne sont pas vraiment heureux, ou qui sont dans une course sans fin qui les mène peut être droit dans le mur, sans faire de prédictions catastrophistes.

Je pense qu’il est important de le signaler à ceux qui désirent entrer dans la Wicca, car je reçois beaucoup trop de contacts de jeunes hommes qui ne me parlent que de magie, qui ne me parlent que de pouvoir et qui ne me parlent jamais de spiritualité. Et c’est étonnant, car chaque fois que je reçois un mail d’une jeune femme, elle me parle de spiritualité. Je trouve cela dommage et qu’il est peut être temps de commencer à voir les choses différemment.

Merci à Amorgen pour l’autorisation de reproduction de cette interview.

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Rencontre avec Amorgen, 2005.

Image par Nadine Doerlé de Pixabay

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