La Virga Aurea et le Calendarium Naturale Magicum

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Édition sommaire, comparée, critique et critiquable de l’oeuvre de Grosschedel, le Calendarium Naturale Magicum, et de la Virga Aurea de Hepburn.

En 1923, F. de Mély publiait à Bruxelles un ensemble 5 planches sous le titre de Virga Aurea et attribué à Jacques-Bonaventure Hepburn d’Écosse :

« Il y a une trentaine d’années, … je découvris sur les quais une plaquette fort curieuse. Elle paraissait composée de signes magiques et kabbalistiques, n’ayant, par exemple, aucune valeur philologique. Elle comprenait 5 grandes feuilles in-fol. gravées; dont les 2 premières se voyaient 72 alphabets de langues soi-disant les plus diverses; les 3 autres feuilles reproduisaient des formules et des figures de la Kabbale, de l’Astrologie, de la Littéromancie, de la Chiromancie. Le titre annonçait qu’elle avait été composée pour le pape Paul V par le frère Jacques-Bonaventure Hepburn d’Écosse… »

Jusqu’à il y a peu j’étais, comme de nombreuses personnes, persuadé que ces 5 planches constituaient un tout, une somme astrologique et magique. Malgré le fait que cette œuvre ait été dédiée à un Pape, l’époque ne semblait pas exclure un tel compendium occulto-magique.

Cependant, un commentateur ayant réagi sur l’article d’EzoOccult concernant la Virga Aurea me détrompa :

« Les informations tirées de l’introduction de F. de Mély (1923) sont FAUSSES POUR LA PLUPART. Sa principale erreur vient du fait qu’il a considéré comme une même œuvre l’ensemble des cinq planches retrouvées par lui sur les quais de Seine à la fin du XIXe siècle. Une autre est d’avoir centré son commentaire sur l’intérêt cryptographique des documents. Une troisième est d’avoir voulu rédiger une introduction sans avoir les connaissances nécessaires pour cela, et ce, dans une perspective purement polémiste.

La Virga Aurea a bien été composée par le bibliothécaire, linguiste et orientaliste du Pape Paul V en 1616.

— Le Calendarium naturale magicum est plus ancien. L’exemplaire de la Bibliothèque Nationale est une version de celui de De Mély après que la signature a été apposée sur la planche originale. Celle-ci donne le nom de l’auteur : Johann Baptist Grosschedel (qui publiera aussi des ouvrages hermétiques en 1629), celui du graveur : Théodore de Bry, et celui de Tycho Brahé, présenté comme « inventor » de la table, avec à côté la date de 1582. Le Calendarium fut donc sans doute imprimé au tournant du XVIIe siècle. Il existe une théorie comme quoi la version de Grosschedel serait une version très améliorée d’une planche à teneur astronomique effectivement due à Tycho Brahé, vue pour la dernière fois au Danemark au début du XIXe siècle, mais on manque de données là-dessus. »

Ainsi donc, il apparaît bien que cette édition de Mély est bien constituée de deux parties distinctes :

– La première comprenant 2 feuilles et intitulée : Virga Aurea septuaginta duobus Encomijs Beatae Virginis Mariae coelata (Verge d’or, ornée de 72 louanges de la Bien-heureuse Vierge Marie), et ce titre est répété en hébreu : Mateb hazhab

Comme l’écrit Cazalas : « C’est un tableau, en quatre colonnes, d’alphabets divers, — dont certains ne sont que des déformations d’alphabets connus et d’autres tout à fait conventionnels, “ainsi devenus cryptographiques, mais d’un usage courant au moyen-âge”. Ils sont accompagnés de petites gravures allégoriques, encloses dans un cercle et illustrant de courtes légendes, tirées des Livres saints. Celles-ci rappellent les invocations des litanies, exaltant les vertus de la Vierge Marie : Gratia plena, Stella matutina, Arca Note, Pulchra ut Luna, etc. Elles sont répétées autour des gravures, qu’elles encadrent, dans la langue ou au moins avec les caractères des alphabets correspondants, au nombre de 72. »

– La seconde comprenant le Calendarium naturale magicum perpetuum profundissimarum rerum secretissimarum contemplationem, totiusque philosophiae cognitionem complectens, de Jean Baptiste Grosschedel (1620 Auteur : I. B. Grosschedel ab Aicha – Thico Brahæ inuentor. 1582.), qui en est un développement. Il semble que ce soit Tycho Brahé qui ait fait les calculs en 1582, et qu’ensuite Grosschedel en ait recopié la table, ce qui explique l’indication de Tycho Brahé comme étant son inventeur. Selon Gilly, en effet, la référence à Tycho Brahé comme inventeur ne signifie qu’une chose : que le Calendarium « imite » la méthode employée par l’astronome danois. Cazalas ne pense pas à l’utilisation d’un pseudonyme, ce qui serait improductif en ce cas, puisqu’il ferait apparaître son nom dans une œuvre dont il rejetterait la paternité…

Tycho Brahé
Tycho Brahé

« Suivent des tableaux de caractères et figures symboliques, astrologiques et magiques, correspondant chacun à l’un des noms de Dieu, écrits hébraïquement avec 1, 2, 3… 10 ou 12 lettres, à la manière des Kabbalistes. Il n’y a pas de nom de 11 lettres, parce que “le nombre 11, étant celui du péché et de la pénitence, n’a aucun mérite”, dit le texte.

On y retrouve, en particulier, avec les noms et les signatures des génies célestes, les sceaux des planètes et leurs carrés magiques; on y voit aussi les signes du Zodiaque, avec les noms de leurs anges, leurs sceaux et leurs carrés ou rectangles numériques très mystérieux, qu’on ne rencontre pas ailleurs et qui n’ont pas encore été expliqués. » (E. Cazalas)

Après le 11e tableau, un avertissement final termine la troisième feuille. Il y est dit en substance :

« Ceux qui voudront bien étudier de près et approfondir ce qui est écrit dans notre Calendrier pourront acquérir la connaissance complète de l’art magique et une expérience infaillible. Quant à vous, misérables calomniateurs, fils d’une aveugle ignorance et d’une inepte méchanceté, arrière! Gardez-vous d’en approcher. S’il est aisé de critiquer, il l’est beaucoup moins d’imiter, et en des matières aussi importantes, il est difficile de plaire à beaucoup, impossible de plaire à tous. »

Concernant son auteur, Grosschedel, Cazalas écrit :

« Mais ce sont surtout les mentions accompagnant les deux autres signatures, qui éveillent la curiosité : Jean-Baptiste Grosschedel ab Aicha, auteur; Tycho Brahé, inventeur. On est bien embarrassé pour définir la part qui revient à l’un ou à l’autre dans la présentation de cette estampe.

Un érudit de la fin du XVIII· siècle, Poinsinet de Sivry, nous raconte que Tycho Brahé “la publia en 1592, en se cachant sous le nom de J.-B. Grosschedel ab Aicha» (Nouvelles recherches sur la Science des Médailles, p; 138, Maëstricht, 1778) et cette version a été reprise dans un ouvrage récent (Paul Vulliaud : La Kabbale juive, II, 51, Paris, 1923). La date indiquée, 1592, au lieu de 1582 que porte l’estampe, est le résultat d’une erreur de lecture ou typographique.

Que le célèbre astronome danois eût éprouvé le besoin de dissimuler sa personnalité, en publiant cette pièce, — ce qui n’était pas sans quelques risques, — c’est tout naturel. Mais quelle singulière façon de se cacher, en y apposant son nom ! On ne voit pas en quoi sa responsabilité eut été bien diminuée par l’adjonction d’un complice, affublé de la mention équivoque d’auteur de l’estampe suspecte, dont lui-même se déclarait plus bas ouvertement l’inventeur.

Ce nom de Grosschedel n’est pas un pseudonyme; il s’applique à un personnage, J.-B. Grosschedel von Aicha, eques romanus, philochimicus, qui publiait encore en 1629, à Francfort-sur-le-Main, des ouvrages hermétiques, où il fait preuve d’une forte pratique des sciences occultes. C’est à peu près tout ce que nous savons de lui, et la citation, au moins étrange, de Poinsinet de Sivry est loin de nous éclairer sur son rôle exact dans la publication du Calendrier ».

Johann Baptist Großschedl von Aicha, né le 5 février 1577, était un noble Allemand féru d’alchimie. Le titre allemand « von Aicha » est une transposition du latin « ab Aicha » qui pourrait être relié à la ville de Aiglsbach en Bavière. La famille des Grossehedl von Perckhausen und Aiglspach était originaire de Ratisbonne.

Selon un manuscrit du British Museum il portait également le titre d’eques romanus (chevalier romain) ce qui suggère qu’il était probablement un membre d’une famille noble du Saint Empire Romain Germanique et prouverait qu’il faisait bien partie de la famille noble des Grossschedel de Ratisbonne.

La Virga Aurea et le Calendarium Naturale Magicum grosschedel
La Virga Aurea et le Calendarium Naturale Magicum

Selon François Secret, « Ce Calendarium fut gravé par Théodore de Bry en 1582 pour un Johannes Grosschedel ab Aicha, qui serait le pseudonyme de Tycho Brahé, qui pratiquait aussi bien l’astrologie supérieure que l’astrologie inférieure ou alchimie » (Hermétisme et Kabbale, 1992). Le contenu de l’œuvre de Grosschedel est surtout une resucée de chapitres IV à XIV du livre II du De Occulta Philosophia d’Agrippa.

Grosschedel ab Aicha Calendarium naturale magicum grosschedel
Page titre du manuscrit du Calendarium naturale magicum de Grossschedel

T. Du Chenteau proposera, en 1775, une version révisée, rectifiée, traduite en français et augmentée du Calendarium, avec notamment des éléments maçonniques et théosophiques inspirés en partie Robert Fludd. Le Duchanteau, auteur du Grand Livre de la Nature ou l’apocalypse philosophique et hermétique (1790), était aussi en quête d’une synthèse numérico-géométrique de l’Univers et éditeur d’un Calendrier magique et perpétuel.

Du Chenteau nous dit qu’il a voulu sauver de l’oubli le Calendrier de Tycho Brahé, « prohibé dès son apparition, les planches détruites et tous les exemplaires connus jetés au feu », sans apporter d’autres précisions.

Calendarium du chenteau
Page titre de la version de Du Chenteau du Calendarium naturale magicum

Elle fut présentée dans le Mercure de France (5 avril 1779) sous ces termes :

« Carte Philosophique & Mathématique, contenant le Calendrier magique & perpétuel, la contemplation des choses les plus profondes & les plus secrètes, avec la connaissance complète de la Philosophie ; de plus, le miroir de toute la Nature, l’harmonie du macrocosme avec le microcosme & la science cabalistique, numérique & théosophique par M. Touray du Chenteau, Mathématicien.

Cette Carte porte 10 pieds de haut sur 2 pieds 7 pouces de large, imprimée sur du grand Louvois.

Elle est remplie d’emblèmes & figures hiéroglyphiques, & contient tout ce que l’esprit humain peut avoir produit de curieux sur les Sciences occultes qui ont les nombres pour base : la Carte de Tycho-Brahé sur les nombres, s’y trouve incluse en entier. On sait l’extrême rareté de cette Carte, qui ne se trouve pas dans les plus fameuses Bibliothèques. »

Ayant pu retrouver l’orignal du manuscrit de Grosschedel ainsi que les tables originales, nous tentons une édition comparative et critique, très critiquable par son côté sommaire et incomplet.

Nous reproduirons ici :

  • Le manuscrit original sans les illustrations. Celui-ci est, à ce qu’il ressort d’une première lecture, un manuel indiquant la position des divers tableaux au sein des planches, de leur contenu et de leur signification, il doit donc se lire en complément et en parallèle des tables ;
  • Les tables du Calendarium naturale magicum. Malheureusement la qualité de celles-ci laisse quelque peu à désirer et il faut les lire et les comparer aux
  • Tables de la Virga Aurea publiées par F. de Mély que nous reproduisons également.

Nous n’espérons pas autre chose que lancer un débat et une recherche qui pourrait, ne sait-on jamais, aboutir à une reconstruction « honorable » du Calendarium.

Vous pouvez vous procurer l’ouvrage, La Virga Aurea et le Calendarium Naturale Magicum, en format papier aux éditions Sesheta.

La Virga Aurea et le Calendarium Naturale Magicum, Spartakus FreeMann, octobre 2010 e.v.

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