L’Anti Calife 1

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L’Anti Calife 1 (première partie) par Peter Lamborn Wilson. 

Ce texte de Peter Lamborn Wilson a pour objet principal la mystique du Shi’isme ismaélien, et plus particulièrement du groupe des Nizaris. Son accès est assez difficile et c’est pourquoi il nous semblait important, outre la traduction, de fournir au lecteur quelques notes introductives ainsi que des notes explicatives de certains termes propres à l’Islam et à la mystique de l’Homme Vert.

Peter Lamborn Wilson : Tout d’abord essayons de voir qui est Peter Lamborn Wilson, que le public francophone peut ne pas connaître sous ce nom. En réalité, Wilson est connu principalement sous le pseudonyme de Hakim Bey, auteur des « Zones Autonomes Temporaires ». Wilson est avant tout défini comme un anarcho-soufi de l’underground. Il est l’auteur de nombreux travaux sur la mystique moyen-orientale, le soufisme et l’ismaélisme.

La réputation de Peter Lamborn Wilson remonte aux années soixante lorsqu’il voyagea en Afrique du Nord, en Inde et en Asie, passant de longues années en Iran où il étudia les textes hérétiques de l’ismaélisme et du soufisme. Wilson traduisit de la poésie perse, écrivit sur les anges et sur l’anarchisme, oeuvres qui sont publiées par Autonomedia à New York. Son dernier ouvrage, non traduit en français, est Sacred Drift.

La secte des Nizârites : Les Nizârites, Hashâchines, ou Assassins, étaient une secte militante musulmane du shii’sme ismaélien active du VIIIe siècle au XIVe siècle.

Mais c’est surtout à partir du XIe siècle (en 1094, à la suite d’une scission importante dans le courant ismaélien) et pendant tout le Moyen Âge, en Perse et en Syrie, que se firent le plus remarquer les Hashâchines (ou « H’ashashines », nommés ainsi par les Croisés), sous l’influence de leur chef Hassan al Sabah’ (aussi appelé le « Vieux de la Montagne », ou le « Vieil Homme de la Montagne »), à partir du fort Alamut, au Sud-ouest de la mer Caspienne. À la fin du Moyen Âge, leur quasi-disparition a coïncidé avec l’essor de la branche principale (quinze millions de fidèles de nos jours) de l’ismaélisme.

– Les débuts avec Hassan ibn al Sabah

Hassan ibn al-Sabbah (1034 ? – 1124), surnommé « le Vieil homme de la Montagne », était le chef charismatique des Nizârites, la secte des Assassins. On retrouve différentes écritures de son nom, comme Hassan i Sabbah, Hassan ibn Sabbah, Hassan al Sabah’, Al-Hasan ibn al-Sabbah ou Alaodin.

Hassan est né à Qom (en Iran) d’une famille chiite, mais il grandit à Ray, près de Téhéran. À l’âge de 17 ans, il rencontre pour la première fois un missionnaire ismaélien, qui, malgré tous ses efforts, ne réussit pas à le convertir à l’ismaélisme. Plus tard il tombe gravement malade, et effrayé à l’idée de mourir sans connaître la Vérité, il reprend contact avec un autre ismaélien et finit par se convertir à l’âge de 35 ans (vers 1071).

Il créa alors sa secte des Hashashins (assassins), et installa sa base dans la légendaire forteresse imprenable d’Alamut, lieu situé à 100 Km de Téhéran, qu’il obtint en rusant.

A partir de cette base il commença alors à organiser sa secte. Il est rapidement remarqué par un dignitaire ismaélien de passage à Ray qui l’envoie quelques années plus tard au Caire, en Égypte. Probablement à la suite de problèmes politiques, il est obligé de revenir en Iran en 1080. Il y passera plusieurs années très actives à parcourir le pays pour propager la foi ismaélienne avec un groupe d’hommes sous ses ordres, dont le nombre sera de plus en plus important. Il sera alors considéré comme dangereux par les autorités sunnites, et sera recherché activement par leur vizir, Nizam al-Mulk.

En 1094, suite à une querelle de succession sur le choix du prochain Imam, l’ismaélisme se divise en 2 branches ; l’une en Égypte les Mustaliens, et l’autre en Iran. À partir de cet instant les ismaéliens iraniens (devenus donc Nizârites) sous la direction de Hassan ibn al-Sabbah se retrouvent livrés à eux-mêmes. Il faut noter que Hassan ne revendiquera pas le titre d’Imam pour lui-même.

C’est sous le règne d’Hassan que vont se développer les assassinats politiques. La première victime de marque sera le vizir Nizam al-Mulk. Ces assassinats étaient effectués par un groupe d’initiés conditionnés. Marco Polo décrira sa forteresse comme un véritable paradis assorti d’un magnifique jardin, de belles demoiselles, et de quatre fontaines d’où jaillissaient du vin, du lait, du miel ou de l’eau. D’après cette légende, il conditionnait ses hommes en leur faisant consommer de nombreuses drogues. Les meurtriers (fedai) sont généralement abattus sur-le-champ. La manière sereine dont ils se laissent massacrer a fait penser aux contemporains qu’ils étaient drogués au haschisch, d’où le surnom de « haschischiyoun » ou « haschaschin » (mangeurs d’herbe), qui donnera Assassin (en réalité, Assassin découlerait en fait du mot « Assas », qui signifie l’Essence, ici, essence de la religion, retour aux fondements). Le premier meurtre sera exécuté en 1092.

En 1094, à la mort du calife ismaélite Al-Mustansir Billah au Caire, une guerre de succession éclate entre ses deux fils Nizar et Al-Musta’li. Hassan al Sabbah prend le parti de Nizar. Mais les partisans de Nizar sont défaits en Égypte et c’est la rupture entre ceux d’Alamut et la majorité des ismaéliens. De là vient l’usage du terme Nizârites. Quoiqu’il en soit, les Nizârites prospèrent sous le règne sévère de Hassan.

Hassan al Sabbah meurt en 1124 à Alamut. Son second Bozorg-Ummid (« Grand Espoir ») lui succède, puis le fils de celui-ci, Mohammed I, en 1138.

Hassan était un homme austère et dur, qui faisait appliquer la loi islamique sans concessions. Il fit exécuter ses deux fils, l’un pour avoir bu du vin et l’autre suite à une accusation de meurtre. On raconte qu’il quittait très rarement sa maison et qu’il a beaucoup écrit. Malheureusement presque toutes ses œuvres furent perdues lors de la destruction d’Alamut par les Mongols en 1256.

– Le déclin

En Iran, après le règne insignifiant de l’instable et violent Imam Mohammed III jusqu’en 1255, son fils Khur Shah est confronté à un ennemi redoutable : l’armée mongole, menée par Hulagu Khan, petit-fils de Gengis Khan, en route pour conquérir et piller le Moyen-Orient. Malgré plusieurs tentatives d’assassinats infructueuses, les troupes d’Hulagu assiègent le château où Khur Shah s’est réfugié. Il finit par se rendre et mourra sur le chemin de la Mongolie. Malgré une résistance sporadique, les autres places fortes tombent ou déposent les armes ; Alamut est rasée et sa précieuse bibliothèque détruite. De nombreux nizârites sont massacrés, y compris toute la famille de l’Imam ; sauf un fils de Khur Shah qui aurait été mis à l’abri à temps pour assurer la succession de l’Imamat.

L’Ismaélisme :

– Histoire

L’origine de l’ismaélisme remonte à la mort en 765 du sixième Imam chiite et des querelles à propos de la succession qui s’ensuivit. Jafar as-Sâdiq avait désigné son fils aîné Ismâil pour lui succéder, mais celui-ci mourut quelques années avant lui. Une partie de la communauté chiite qui formera ultérieurement la branche imamites choisit son autre fils Mûsâ al-Kâzim comme septième Imam. Les futurs ismaéliens quant à eux rejetèrent cette décision et se rassemblèrent autour du fils d’Ismâil, Muhammad ben Ismâil qui devint leur nouvel imam. D’autres qui n’admettaient pas la mort d’Ismâil répandirent la croyance de son occultation et la promesse de son retour sous les traits du Mahdi. Persécutés, les ismaéliens continueront à vénérer secrètement leur imam tout en déployant un prosélytisme (da’wa) très actif d’abord au Moyen-Orient puis à travers tout le monde musulman. Ils parviendront ainsi à s’établir au Maghreb parmi les berbères puis se lanceront à la conquête de l’Égypte où ils fonderont la glorieuse dynastie fatimide. D’autres ismaéliens aux idées révolutionnaires, les qarmates qui récusaient le pouvoir des califes-imams fatimides, créeront un État à Bahrein et marqueront l’histoire par leur usage excessif de la violence. Les ismaéliens connaîtront durant le califat fatimide une nouvelle rupture en 1094, à la mort du calife Al-Mustansir Billah qui engendrera deux groupes rivaux : les Nizârites et les Musta’liens.

– Théologie

Des ismaéliens professent des doctrines très complexes influencées par les néo-platoniciens, le gnosticisme, le manichéisme ainsi que par des croyances empruntées aux autres confessions. Très tôt, ils se sont distingués par leur façon très particulière de concevoir la religion. Pour eux, l’islam renferme deux principes complémentaires, l’un exotérique (zâhir) représenté par le prophète et la sharia, l’autre ésotérique (bâtin) personnifié par l’imam et l’interprétation mystique de la loi islamique. Les ismaéliens sont donc adeptes de l’interprétation allégorique des textes qui doit mener les croyants à la connaissance de la vérité suprême. À Alamut, les Nizârites réformeront l’ismaélisme, en abandonnant définitivement les prescriptions rituelles islamiques pour se focaliser uniquement sur le côté ésotérique de leur foi.

I.

Et Khezr [1], le Prophète Occulte, l’Homme Vert, le Roi de l’Hyperborée, l’astucieux serviteur de Moïse, la maître-tricheur d’Alexandre, le Khezr qui but à la Fontaine de la Vie dans le Pays des Ténèbres. Les fleurs et les herbes poussent sous ses pas, et il marche sur les eaux, s’acheminant vers le vaisseau d’Ibn Arabî [2], se rapprochant ; sa robe verte traînant sur les ondes vertes. Ou bien Khezr apparaît dans le désert avec de l’eau et une initiation pour les immatériels, les fous et les maudits, les uniques… « Et trois choses de cette vie valent la peine d’être vues : l’eau, les choses vertes et un joli visage… » et l’Imam Caché qui disparut dans une grotte, peut-être à Samara, peut-être au Yémen, qui vit au-delà des Isthmes de la Similitude au milieu de la Mer des Images, sur une île d’émeraude, avec des arbres d’émeraude et des fleurs de béryl vert, des palais de jaspe ou de jade – le jeune homme vêtu en noir qui apparaît aux alchimistes dans leurs rêves, qui initie par les rêves…

Et Uways al-Qarani [3], l’ermite du Yémen qui rencontra le Prophète – mais uniquement en rêves – celui qui releva la Maison d’Ali – qui apparaît en rêves à ceux qui n’ont point de maître et qui les initie au sein de l’Ordre de l’Ovaysiyya.

II. La Silsilah [4].

– Sohrawardi al Magtul [5], qui fut exécuté pour hérésie, établit pour lui-même une silsilah ou chaîne initiatique constituée de maîtres qu’il rencontra lors de visions ou de rêves – c’est-à-dire, qu’il rencontra dans le Royaume Imaginal. Suit alors une liste, sans ordre particulier, de noms qui constituent chacun un lien dans une telle chaîne – imaginale ou imaginaire…

– Mansur ibn al-Hallaj [6], exécuté pour hérésie pour avoir prêché « Je suis la Vérité », défenseur de Satan en tant qu’« amant parfait », supporter de la rébellion Zinjarite des esclaves noirs, condamné au gibet par ordre de son propre maître soufi ;

– Hafez Shirazi [7], qui recommanda que nous « teignons nos tapis de prière avec du vin » ;

– Mohamed Shabistari [8], qui dit « si les musulmans comprenaient réellement l’Islam, ils seraient idolâtres » ;

– Ahmad Ghazzali, Fakhrodin Iraqi & Awhadoddin Kermani, les trois poètes du Jeu des Témoins ou de la « Contemplation du Glabre » ;

– Cheikh Hussaïn Kashefi, patron des alchimistes et Saint de Hérat ;

– Lal Shabazz Qalandar, le « Faucon Rouge » du Sindh, cheikh des derviches sans loi et des Assassins ;

– Hassan i Sabbah, le Vieux de la Montagne d’Alamut, fondateur des Assassins [9] ; et son descendant Hassan II, la Paix soit sur Lui, qui déclara que « les chaînes de la loi étaient rompues » ;

– L’Anti-Calife fatimide égyptien Hakim qui écrivit un traité sur l’alchimie et ordonna que le jour soit nuit et la nuit soit jour au Caire, et qui disparut dans le désert ;

– Sunan Kalidjaga [10], qui introduisit l’islam ésotérique à Java et qui inventa le théâtre de marionnettes Wayang Kulit, théâtre basé sur l’épique hindoue ;

– Mushtaq Ali Shah le musicien fou qui fut lapidé à mort à Kerman pour avoir joué l’appel à la prière sur sa sitar ;

– Mohiyoddin Ibn Arabî, initié par Khezr, chassé du Caire pour avoir écrit des poèmes amoureux à une jeune fille de quatorze ans, fondateur de l’École de l’Unité de l’Être.

En invoquant chacun de ces personnages afin d’obtenir une baraka spéciale sur cette présente oeuvre, nous en avons dit assez à ceux qui sont familiers avec leurs noms, ce qui va suivre sera presque superflu. On rencontre ces cheikhs lors de pèlerinages sur leurs tombes, ou par leurs livres (car les cénotaphes et les divans sont tous deux des objets carrés qui semblent retenir l’esprit vivant) – ou par des visions ou des rêves – et pratiquement tout ce que nous dirons ici est déjà absorbé par leur présence.

« La Théorie de la Catastrophe » est une science qui s’occupe des changements soudains et drastiques dans quelque processus d’un système donné, comme la tectonique des plaques ou la société humaine. Dans l’usage populaire le mot catastrophe a une connotation « négative », mais des changements soudains peuvent également être expérimentés comme étant positifs. La Révélation elle-même pourrait s’appeler une catastrophe. La vision mystique ou la Sagesse (hikmah) peut également oeuvrer de manière catastrophique dans le système que l’on appelle la « conscience humaine ».

Les érudits se limitent généralement à la description des changements tandis que les mystiques et les poètes préfèrent participer ou même précipiter les catastrophes de la conscience. Ce qui suit ne peut être classé ni de manière universitaire ni de manière mystique ou poétique ; c’est plus un prolégomène à l’étude de certaines potentialités catastrophiques au sein des enseignements d’Ibn Arabî et de la tradition hérétique. Ici, nous ne sommes concernés ni par les faits ni par la poésie per se, mais par les faits poétiques – des informations qui, dans une certaine densité, peuvent causer des changements soudains ou des brisures dans la frontière entre la conscience ordinaire et l’alam-i-khyyyal ou Monde de l’Imagination.

Ce qui suit est presque plus une histoire qu’un texte universitaire – l’idée de la « fiction » aidera à fournir un « biseau » à notre confusion, notre hyperbole et rhétorique, à notre orientalisme, à nos scandaleuses et infondées assertions. Ce texte peut se pousser lui-même jusqu’à pointe du discours, mis en danger d’un crash à la « Humpty-Dumpty [11] » dans une sémantique arbitraire (« les mots signifient ce que je veux qu’ils signifient ! »). Comme un poète persan (Salman Savaji) l’a dit : « Qui ne connaît pas ma mauvaise réputation est comme une gouttière tombée du toit ! »

III. Ibn Arabî et l’Hérésie.

Dans sa longue et belle introduction à son Imagination Créatrice dans le Soufisme d’Ibn Arabî, Henri Corbin résuma, en fait, une philosophie idiosyncrasique de la « Sagesse orientale » qui illumina toute son oeuvre. Cet essai se présente lui-même comme prenant ses racines dans une tradition : Corbin mentionne tous ses personnages favoris (dont nombre sont cités dans le paragraphe Silsilah). L’essai de Corbin se focalisait sur certains événements de la biographie du Cheikh al-Akbar [12], mais le texte sous-jacent est en fait une autobiographie spirituelle. Comme il le dit, il a vécu certains événements, temporels et intemporels, historiques et spirituels. La ta’vil [13] dans ce contexte sert plus que de simple outil de l’intellect ou même de l’imagination : il agit comme un bathysphère, il offre la possibilité de plonger totalement son « moi », corps inclus, dans les profondeurs – une Machine à Catastrophes !

Un de ces événements, l’anniversaire de Ibn Arabî, provoque en Corbin un enthousiasme dans la simple synchronicité occulte, la célébration d’une coïncidence qui revêtait pour lui une importance archétypale. Selon le calendrier lunaire, cet anniversaire (17 Ramadan 560 / 28 juillet 1165) marquait le premier anniversaire de la proclamation de la Grande Résurrection d’Alamut [14] (17 Ramadan 559 / 8 août 1164). L’exquise hagiographie de Corbin nous invite à méditer sur ce double anniversaire, ce jour saint, mais il n’arrête pas de nous expliquer pourquoi. Une clé a été offerte, ou, peut-être, qu’une des obsessions de Corbin a fait brièvement et mystérieusement surface. Qu’était la Grande Résurrection [15] et quel lien pouvait-elle avoir avec Ibn Arabî en dehors d’une coïncidence de date ?

Corbin lui-même avait beaucoup à dire sur ce sujet dans d’autres livres, que l’on ne peut que fortement recommander. Ici cependant, une autre version est proposée, une version basée sur la signification littérale de la Grande Résurrection du Ruz-i-Qiyamat [16]. Brièvement, Hassan II, le Pîr ismaélien d’Alamut, proclama ce jour comme celui de l’abrogation ésotérique générale de la Shariah [17]. Le voile de la dissimulation (taqiyya) fut levé de sur les lettres de la Loi, et sa forme extérieure fut détruite. « Les Chaînes de la Loi furent rompues ». Le dévoilement de la signification ésotérique de la Révélation résulte en une inversion bénigne de son symbolisme extérieur ; ceux qui participent à cette gnose sont libérés à la fois de la signification littérale et des obligations légales de la religion organisée. Dans les deux sens du terme, ils ont cassé le code. Les Ismaéliens (ou Assassins) d’Alamut signalèrent cette amnistie générale de la tyrannie de l’Autorité Exotérique en buvant du vin lors d’un repas pris en plein Ramadan ; ils brisèrent ainsi leur abstinence pour toujours.

L’Islam exotérique devait considérer le Qiyamat (Résurrection) comme antinomienne, hérétique et révolutionnaire – et, effectivement, c’est ce qu’il fit avec raison. Il n’y a aucun doute, comme Corbin le souligne, que l’ismaélisme était au départ une Gnose, une Sagesse Orientale – mais qu’il a aussi agit par une terreur militante et clandestine afin de faire sa propre propagande. Dans l’Islam, où la politique et la religion sont des parties conjointes de la vie et de la culture, l’« hérésie » fonctionne à la fois en tant que critique et que polémique, en tant que discours et en tant que guerre. L’hérésie parle le même langage que sa culture environnante mais insiste sur le fait que certains mots possèdent une signification catastrophique : des significations cachées capables de transformer soudain un monde entier de l’intérieur, tel un phénix auto-résurrecteur.

La Qiyamat, donc, représente une brisure radicale avec l’Islam institutionnel, rituel et traditionnel – une rupture qui ne peut être attribuée à Ibn Arabî. Ses écrits autobiographiques portent témoignage d’une intention soufie classique d’intensifier l’aspect rituel de l’Islam. Néanmoins, les ultra-orthodoxes ont toujours regardé le Cheikh comme dangereux, si ce n’est suspect.

Par exemple, alors qu’il vivait en Égypte, il publia son Interprète des Désirs, un livre de poèmes célébrant son amour pour une jeune fille qu’il rencontra lors de sa circumambulation de la Kaaba à La Mecque. L’uléma local sentit le blasphème ; Ibn Arabî se retira hâtivement en Syrie – et nous pouvons remercier les mollahs outragés de lui avoir inspiré son oeuvre future, « L’Interprète de l’Interprète », dans lequel il défend ses ambiguïtés érotico-mystiques avec une érudition illuminante. Des siècles plus tard (il y a quelques années) Ibn Arabî eut encore des ennuis avec l’Egypte : la Fraternité des frères musulmans et autres réactionnaires inspirèrent une loi bannissant la publication de ses « Révélations de La Mecque ». Et des érudits tels Fazlur Rahman le blâment aujourd’hui encore de la ruine du soufisme orthodoxe.

La masse continentale d’Ibn Arabî, pour nous exprimer ainsi, couvre trop de territoires pour coller à n’importe quelle carte. Ses écrits ont été utilisés afin d’offrir un support au plus pur mysticisme orthodoxe – comme dans les ordres soufis d’Afrique du Nord par exemple – aussi bien qu’à de nombreux types d’ésotérismes islamiques, certains n’étant pas du tout orthodoxes. Des traités tels le R. al-ahadiyya (basé sur le Hadith [18] « Ceux qui connaissent le Seigneur »), qui présente un monisme pur et radical, pourraient aussi bien servir les buts illégaux des métaphysiciens ismaéliens. En réalité, Corbin montre que les Ismaéliens ne firent pas une telle utilisation des enseignements d’Ibn Arabî sur la ta’vil, l’Homme Parfait, l’Unité de l’Être etc. Les Nizaris d’Alamut expérimentèrent la Grande Résurrection en tant que moment historique et comme Archétype mystique ou imaginal ; ce qu’Ibn Arabî leur offrit fut un vocabulaire nouveau avec lequel ils étendirent leurs exégèses de la Qiyamat et de ses ramifications radicales.

Aux poètes perses, le Cheikh (Ibn Arabî) offre encore une autre carte, une carte qui commence son projet cartomancien avec des textes comme L’Interprète des Désirs et le 28e chapitre du Fusus al-Hikam (basé sur le hadith « Trois choses de ce monde sont dignes d’amour : les femmes, le parfum et la prière »). Ici, l’amour est déclaré comme l’équivalent ou le supérieur de la religion ; l’être aimé devient un Témoin (shahed), une Théophanie du Réel. A nouveau, les poètes reçurent d’Ibn Arabî un langage du discours avec lequel ils étendirent leur compréhension d’un complexe déjà central à leur être : l’éros, le désir et la frontière entre la conscience érotique et mystique.

D’une telle spéculation naît une pratique spirituelle, le « Jeu du Témoin », qui utilise le Yoga Imaginal afin de transmuter le désir érotique en conscience spirituelle. Les moyens comprennent l’improvisation poétique et musicale, la danse et l’observation chaste des jeunes garçons (d’où la pratique connue comme « Contemplation du Glabre », du sans barbe).

Cet enseignement fut perfectionné dans les siècles qui suivirent la mort d’Ibn Arabî par une série de poètes talentueux fortement associés à son Ecole – Fakhroddin Iraqi, Awhadoddin Kermani et Abdul Rahman Jami, pour nommer trois des plus connus. Sans référence spécifique au Jeu du Témoin, d’autres poètes tels Mahmud Shabistari et Shah Nematollah Vali synthétisèrent la métaphysique d’Ibn Arabî en un symbolisme poétique et romantique général. Tout ceci constitue ce que l’on peut appeler une « École de l’Amour » persane au sein du contexte général de l’École de la wahdat al-wujud [19].

Il est inutile de dire, bien que des poètes du Jeu des Témoins suivirent à la lettre la Shariah et son code textuel, que leur jeu dangereux de la Sublimation fut condamné comme hérésie par des gens tels Ibn Taymiyya [20], qui se plaignit « Ils embrassent un enfant esclave et proclament avoir vu Dieu ! » Aussi orthodoxe ou non que les soufis puissent avoir été dans leurs vies privées, leur poésie aida grandement les « véritables hérétiques » tels les ismaéliens, qui prirent, bien sûr, à la lettre les lignes suivante de Iraqi :

« Oublie la Kaaba : Les portes du vignoble sont ouvertes ! »

En dépit des protestations des érudits comme Ivanov et même Corbin, les derniers ismaéliens (post-Alamut) n’adoptèrent pas le soufisme perse des derviches comme un simple masque. Ils incorporèrent des poètes tels Shabastari et Shah Nematollah dans leur grande synthèse, juste comme ils le firent avec la métaphysique plus austère d’Ibn Arabî.

En dressant la carte de l’influence d’Ibn Arabî sur la tradition hérétique, nous voyons son langage (ou marque de fabrique) repris par les philosophes rebelles, cosmopolites et érudits, ainsi que par les poètes soufis. Mais tandis que cette synthèse se meut de l’Est vers l’Andalousie au travers de l’Égypte et de la Perse, elle commence à acquérir un aspect plus populaire et cultuel. Les sectaires chiites tels les Qizilbashi, les Hurufi, les Alevis, les Bekhtashi, les Ahl-i-Haqq, les Ali Hahi, les Kakhsari, les Ovaysi – et les alchimistes chiites – héritent tous de ce mélange. En Afghanistan et dans le Nord de l’Inde, la tradition comprend les Ordres Derviches Sans Lois tels que les Qalandars, les danseurs travestis et les fumeurs de haschich, les ordres soufis hétérodoxes tels les Shattariyya (« Voie Rapide ») et certaines branches de la Sohrawardiyya ; ainsi que des sectes syncrétistes telle celle de l’Empereur Akbar Din i Hahi, ainsi que de nombreuses combinaisons populaires de l’ismaélisme, de l’hindouisme tantrique, du Yoga Bakhti, du Shi’isme millénariste et de la folie derviche.

Tous ces noms ne sont pas donnés simplement pour remuer la poussière mystico-académique mais afin de pointer vers un projet ; une tradition a été invoquée ici afin que nous nous posions la question de savoir si elle existe toujours, si elle possède une vitalité pratique et ésotériologique. Imaginons que cette tradition, qui ne sera plus identifiée seulement avec Ibn Arabî, puisse être personnifiée ou poétisée. Appelons-la « l’Anti-Calife », avec des références à ses antécédents hérétiques et en l’honneur des « Anti-Califes » Ismaéliens Fatimides d’Égypte tels Hakim Billah, l’alchimiste dont le nom « le Sage » fait écho au thème de notre article. Ce personnage de fiction, l’Anti-Calife, qui est également un texte, sera la bannière de notre résurrection imaginale de la tradition qu’il évoque.

L’Anti-Calife n’existera qu’au sein des confins de ce texte, là où il agira en tant qu’oracle, répondant à certaines questions au sujet du passé, du présent et du futur. L’Anti-Calife peut être antinomien, hérétique, fou, blâmable – mais il demande à être reconnu pour sa propre « autorité traditionnelle » et il tourne ses réponses en référence a son propre passé authentique et cohérent.

Nous voulons connaître la signification du passé, mais encore plus – si nous pouvons opérer une petite phénoménologie herméneutique [21] et vivre au moins une heure au sein du monde de l’Anti-Calife – nous demanderons à connaître ce qu’il peut nous enseigner ici dans ce plan hautement mystérieux (la vie de tous les jour) et en cet instant très précieux, le présent. Lorsque ce texte sera lu, nous pourrons lui permettre de retourner vers le Monde Imaginal – et peut-être de retenir de lui quelques faits poétiques.

Lire la suite ou lire la troisième partie.

Plus sur le sujet :

L’Anti Calife 1, Peter Lamborn Wilson.

Image par Hans Braxmeier de Pixabay

L’Anti Calife 1 © Peter Lamborn Wilson, traduction française par Spartakus FreeMann, Nadir de Libertalia, mars 2004 – août 2006 e.v.

Notes :

[1] Ou encore Al-Khidr ( الخضر) ou « Homme Vert » (Khidr, Khezr, Khizr, Khadir, Al-Khadir, et El-Khidr). On suppose que l’on se réfère à lui dans le Sourate du Coran Al-Kahf (18:66), relatant sa rencontre avec Moïse.

[2] Mohammed Ibn ’Arabî (محمد ابن عربي), connu sous son seul nom de Ibn ’Arabî (1165, Murcie dans le pays d’al-Andalûs – 1240, Damas). Appelé aussi « Cheikh al-Akbar » (« le plus grand maître », en arabe) , il est un mystique, auteur de 846 ouvrages. Son œuvre aurait influencé Dante et Saint-Jean-de-la-Croix. Dans ses poèmes il traite de l’amour, de la passion, de la beauté et de l’absence. Pour Ibn ’Arabî, la voie mystique n’est ni rationnelle ni irrationnelle : l’esprit s’échappe des limites de la matière. Contrairement à la philosophie, elle se situe hors du domaine de la raison. Ainsi, contrairement à la scission dessinée par Averroès entre foi et raison, la profondeur d’Ibn ’Arabî se situe dans la rencontre entre l’intelligence, l’amour et la connaissance. Aujourd’hui encore, Ibn ’Arabî est un auteur controversé dans l’Islam. Ses approches exégétiques, sa conception du messianisme à travers la figure emblématique du Mahdi suscitent des polémiques. Il reste une référence pour les écoles soufies qui voient en lui l’héritier spirituel de Mahomet. C’est à l’Espagnol Asin Palacios que l’on doit la redécouverte en occident des ouvrages d’Ibn Arabi, ainsi qu’à Henry Corbin. Ses oeuvres principales sont : La vie merveilleuse de Dhû-l-Nûn l’Egyptien – Le livre de l’Extinction dans la Contemplation – Le Traité de l’Amour – Le Traité de l’Unité – Le Voyage vers le Maître de la Puissance – Les Soufis d’Andalousie – Les Illuminations de la Mecque – La Sagesse des Prophètes – L’Alchimie du Bonheur parfait – L’interprête des désirs – L’Arbre du Monde – « Le dévoilement des effets du voyage », édition du texte arabe, traduction introduction et notes de Denis Gril, Editions de l’Eclat, 1994 et La production des cercles, édition du texte arabe Nyberg, traduction et introduction Paul Fenton et Maurice Gloton, Editions de l’Eclat, 1996.

[3] mystique musulman qui fit partie de la génération qui suivit immédiatement le Prophète. Il fut un des martyrs de la Bataille de Siffin qui vit la défaite du Calife Ali.

[4] Silsilah ( سلسلة ) signifie « chaîne ». Les Soufis utilisent ce mot afin de signifier un lignage de Cheikhs au sein d’un ordre soufi particulier.

[5] Suspecté de propager la théosophie ismaélienne en Syrie, Soharwardi est arrêté sur l’ordre de Salah al Din (Saladin) et exécuté en la citadelle d’Alep le 5 Rajab 587 de l’Hégire (29 juillet 1191). Né trente six ans plus tôt à Sohraward au nord-ouest de l’Iran, ce philosophe pratiquant le soufisme et inspiré par l’œuvre de Platon et d’Aristote est l’auteur d’une cinquantaine d’ouvrages dont « Le livre de la sagesse » est considéré comme le chef-d’œuvre. La pensée de Sohrawardi s’inscrit dans la tradition initiée par Al Farabi et Ibn Sina. Il a été démontré tardivement que sa pensée a influencé l’œuvre de Rabbi David Maïmonide, chef de la communauté juive d’Egypte au XIVème siècle. Alors que l’œuvre de Sohrawardi a occupé une place significative dans le monde arabe, il est remarquable qu’elle ne soit connue de l’Occident que depuis une période récente.

[6] Mansur al-Hallaj en entier Abu al-Mughith al-Husayn ibn Mansur al-Hallaj, né vers 858 (ou 245 de l’Hégire), mort en 922 (ou 309 de l’Hégire) à Bagdad, était un poète mystique soufique, auteur d’une abondante poésie tendant à renouer avec la pure origine du Coran et son essence verbale.

[7] Hafez de son vrai nom Khouajeh Chams ad-Din Mohammad Hafez-e Chirazi (en persan : خواجه شمس‌الدین محمد حافظ شیراز ) est un poète et un mystique persan né autour des années 1310-1337 à Chiraz (Iran) et mort à l’age de 69 ans. Il serait le fils d’un certain Baha-ud-Din. Hafez est un mot arabe, signifiant littéralement gardien qui sert à désigner les personnes ayant mémorisé par coeur l’intégralité du Coran. Il est surtout connu pour ses poèmes lyriques, lesghazals, qui évoquent des thèmes mystiques du soufisme en mettant en scène les plaisirs de la vie. Son mausolée est au milieu d’un jardin persan à Chiraz et attire encore aujourd’hui de nombreuses personnes, pèlerins ou simples amoureux de poésie, venus lui rendre hommage.

[8] A’d od-Din Mahmoud Chabestari est un mystique soufi iranien ayant vécu au XVe siècle de l’ère chrétienne. On ne sait pas grand-chose sur sa vie, mais son œuvre principale, la Roseraie du Mystère (Golchan-e raz), est un des classiques du mouvement auquel il appartient. C’est un poète encore très apprécié dans son pays d’origine, où se trouve son tombeau.

[9] Le terme assassin, sous lequel on qualifie également la secte (La secte des assassins), aurait la même racine que haschish, une des drogues que le Vieil Homme aurait utilisées pour conditionner ses disciples. En effet, en arabe, « mangeurs de haschish » se dit aššāšīn (حشاشين sans les diacritiques). Cette hypothèse étymologique est cependant contestée par certains arabisants comme Amin Maalouf, qui donne dans son roman Samarcande (mettant en scène, entre autres, Hassan ibn al-Sabbah), une étymologie différente et somme toute moins évocatrice : le mot proviendrait de assâs, qui signifie « base, fondement ». Voir introduction

[10] Sunan (Roi) Kalidjogovan (également appelé Kalidjaga) est crédité par certains pour avoir donné au jeu antique de Wayang sa forme actuelle.

[11] personnage de Lewis Carroll : il apparaît dans Au travers du Miroir , dans lequel il discute de sémantique et de pragmatisme avec Alice : When I use a word, Humpty Dumpty said, in rather a scornful tone, it means just what I choose it to mean — neither more nor less.

[12] Ibn Arabî, voir note ii.

[13] exégèse.

[14] Alamut, le nom de la vallée où se tenait autrefois une forteresse réputée inexpugnable qui servit de base à la secte chiite hérétique des Nizârites, aussi appelée secte des Assassins. Alamut n’est pas le nom de la forteresse ; la forteresse s’appelle Qasir Khan, elle se trouve dans une vallée secondaire, à côté du village du même nom. Bien que cela soit une erreur, La forteresse est appelée communément Alamut (qui est en fait le nom de la vallée). Alamut est une vallée du massif de l’Elbrouz au sud de la mer Caspienne, près de la ville de Qazvin dans le nord-ouest de l’Iran actuel. L’origine du nom est incertaine, une signification possible étant « nid d’aigle ». Voir introduction

[15] La « Grande Résurrection » : en 1162, Hassan II succède à son père Mohammed I. Il va totalement bouleverser les conceptions religieuses des nizârites. Lors du ramadan de 1164, il annonce au nom de l’Imam caché la « Résurrection » (qiyama), et abroge la loi islamique, notamment l’interdiction de boire du vin et le carême. Son règne sera bref, il est assassiné dix-huit mois plus tard par un opposant à la nouvelle doctrine. Son fils Mohammed II va consolider la nouvelle foi ; il ira même plus loin en se proclamant descendant direct de Nizar, ce qui ferait de lui un Imam (qui est le « vrai guide spirituel et temporel de toute la communauté islamique »). Hassan III met fin à cette hérésie et réinstaure la charia dès la mort de son père en 1210. Toutefois, à la différence de l’époque de son père, les nizârites se conforment désormais au rite sunnite, et abandonnent le chiisme.

[16] qiyamat signifie « résurrection » et ruz est l’« année » on peut penser que cela se traduit par « année de la résurrection ».

[17] La sharîa (charî‘a , arabe : شَرِيعَة = la voie) est le code de jurisprudence religieuse musulman. Le terme est aussi utilisé en arabe pour : « ce qui a été légiféré [par Dieu] ». On a coutume de désigner sharîa en Occident sous le vocable de loi islamique.

[18] Hadith (arabe : حديث , hadith ; tradition du prophète, pl. أحاديث) est un terme arabe qui désigne des paroles ou actes de Mahomet considérés comme des exemples à suivre par les musulmans.

[19] La notion de wahda al-wujûd (وِحدَةُ الوُجُودِ ) est l’affirmation que la création est en Dieu et que Dieu est dans Sa création. Cette notion est en totale opposition avec le Dogme Islamique qui considère que Dieu est trop noble pour être dans Sa création, et que celle-ci est trop vile pour être en Dieu.

[20] Ahmad ibn `Abd al-Halim ibn `Abd Allah ibn Abi al-Qasim ibn Taymiyya, Taqi al-Din Abu al-`Abbas ibn Shihab al-Din ibn Majd al-Din al-Harrani al-Dimashqi al-Hanbali (661-728). Un des érudits les plus influents de l’école Hanbali.

[21] L’herméneutique (du grec hermeneutikè, art d’interpréter et du nom du dieu grec Hermès, nom du messager des dieux et interprète de leurs ordres) est l’interprétation de tout texte nécessitant une explication, notamment dans la critique littéraire ou historique et dans le droit ou même dans le cadre de la psychanalyse. On parle d’herméneutique pour l’interprétation des textes, en général, anciens, en particulier, voire de toute œuvre que son herméneutique, dans le cas de l’art contemporain par exemple, est parfois appelée à recouvrir. Celle des écritures saintes qu’il s’agisse de Bible ou de Coran est un sujet qui demeure délicat. On désigne aussi par herméneutique la réflexion philosophique interprétative sur les symboles religieux et les mythes.

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