L’Alchimie Sexuelle Chinoise, recette de l’Immortalité

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L’Alchimie Sexuelle Chinoise, recette de l’Immortalité par Mystiik.

Une bien précieuse semence

Pour les Grecs et les antiques, le corps humain contient quatre liquides dont l’équilibre en volume et dans la localisation corporelle déterminent la santé. Ces liquides sont le sang, le phlegme (liquide plus ou moins clair que l’on voit en se mouchant), la bile jaune (dans certains vomissements) et la bile noire.

Or le liquide émis par les femmes et aussi le sperme de l’homme sont considérés comme venant du sang. Une éjaculation équivaut à une perte de sang et en abusant, on peut se débiliter et risquer la maladie, voire la mort. Cette croyance vivace au Moyen-âge chrétien ne concerne que les adultes. Les jeunes sont censés émettre seulement un liquide imparfait, donc ne pas risquer grand-chose et au moyen-âge les enfants et les adolescents peuvent « jouer » sans intervention particulière jusqu’au 18e siècle encore, même si ces jeux ont lieu dans la salle commune, ou autour du poêle, à l’école.

À partir du 18e siècle et surtout au 19e siècle, cette dépense « gratuite » d’une énergie vitale dont le capital est compté est très mal vue. Les médecins avancent alors à ce propos des idées incroyables aujourd’hui et la masturbation est devenue la cause de nombreuses maladies : maladies nerveuses, maladies sexuellement transmissibles comme la syphilis, ainsi que des cancers. Sans compter la bien connue surdité.

Cette notion de semence, concentrée de force vitale et dont il faut réduire la dépense au minimum est également une croyance extrême-orientale très ancienne. Les Maîtres de l’alchimie chinoise taoïste avaient la même conviction. La simple production de « fluide génératif » au sein du corps humain semblait défavorable au point de conseiller un régime alimentaire spécifique pour la réduire au minimum. Il est même dit « que des gens âgés moururent avant leur temps parce qu’ils avaient continué à entretenir des relations sexuelles, dilapidant ainsi leur ‘fluide’ ».

Le chemin du cinabre de la tradition alchimique chinoise

L’alchimie chinoise fut une des premières du monde et son fondateur reconnu historiquement serait Tsou Yen au 4e siècle de l’Ere Commune même s’il existe de nombreux textes qui prouvent sa pratique depuis des siècles. Un des objectifs de l’alchimie fut la recherche de l’immortalité, « permettant aux hommes de s’assimiler aux dieux. Le divin cinabre, équivalent chinois de ’l’or potable occidental’ apparaît dans les textes tantôt comme une substance physique permettant la prolongation de l’existence corporelle, tantôt chez les taoïstes surtout, comme le symbole de l’état spirituel à partir duquel l’être n’est plus soumis au temps. » Le cinabre apporte l’immortalité.

L’alchimie chinoise eut vite fait de considérer 2 concepts : le concept exotérique (wai tan) où les substances étaient considérées comme bien réelles, et un concept ésotériste (nei tan) où on considérait la nature, l’âme de ces substances.

Le principal représentant de ce dernier courant est Ko Chang Keng (appelé aussi Po Yu Chuan). Pour lui, l’œuvre alchimique suppose la transformation du corps humain qui joue le rôle du creuset et de la matière première.

Il définit 3 méthodes pour lesquelles la maîtrise de la respiration tient une part importante, mais aussi la maîtrise de l’éjaculation.

L’Oeuvre

La force générative

« L’alchimie sexuelle chinoise imagine la semence comme secrétée par ce qu’elle appelle la ’force générative’. Le premier pas dans le processus de la fabrication de l’élixir d’immortalité consiste à empêcher la force générative de suivre son ‘cours habituel’ c’est-à-dire produire la semence en allumant ’le feu interne’. Cela se réalise grâce à une sorte de respiration régulière et profonde très similaire au pranayama du hatha yoga hindou. L’inspiration provoque une pression se répercutant sur la force générative enfouie dans un creuset (ou centre d’énergie psychique plus ou moins comparable à un chakra) situé dans le bas ventre.

La force monte alors le long d’un canal psychique, voisin de l’épine dorsale jusqu’au sommet de la tête. Puis l’expiration profonde du souffle fait redescendre le force par un autre canal psychique placé à l’avant du corps et le ramène dans le creuset d’où elle émane. Le processus se poursuit jusqu’à ce qu’on considère la force générative comme suffisamment purifiée pour se transmuer en plomb lequel peut se comparer dans le cas présent au prana du yoga.

Alors, on fait monter cette force du creuset jusqu’au plexus solaire où se produira la transformation.

Au cours de processus, l’excitation sexuelle n’est pas systématiquement évitée. Ce qu’on évite, c’est l’éjaculation, élan donné par l’excitation devant trouver son emploi dans la création du plomb (énergie vitale). Selon Chang Sen Feng, les personnes qui ne ressentent aucun désir spontané doivent recourir à la masturbation.

La force vitale

La cessation de l’érection est considérée comme la preuve que la force générative s’est frayé sa voie en direction du centre psychique du plexus solaire. À partir de là, elle devra monter vers un centre psychique de la tête (proche de la glande pinéale) pour se transformer en mercure, en force spirituelle, grâce à des exercices de respiration et de visualisation.

Une technique consistait à contracter son anus, à exécuter 7 respirations profondes et à coller sa langue au palais pour intensifier le flot de salive afin de l’avaler d’un seul coup une fois la bouche remplie. Cette salive se concentre alors dans le bas ventre, le creuset, où elle se transforme en force générative, principe constitutif de la semence.

La manifestation de l’esprit

La force vitale ayant atteint le centre psychique de la tête, reste à opérer la ‘copulation intérieure‘. Ceci s’effectue par des roulements d’yeux par série de 60, lentement et accompagné de respirations profondes.

Cette pratique entraîne la ‘manifestation de l’esprit’ qui devra descendre dans le creuset de la base de l’abdomen, ‘le centre de l’eau’ afin qu’il s’y fixe. Le mercure, l’esprit stabilisé, s’enveloppera de plomb, la force vitale, précédemment purifiée par les vibrations subies lors des montées et descentes continuelles dans les canaux psychiques qui relient ’le centre de l’eau’ de l’abdomen, au ’centre du feu’ situé dans le cœur. L’embryon immortel est le produit de l’union du mercure et du plomb.

Le souffle éternel et la graine d’immortalité

L’opération suivante est la pratique du ‘souffle éternel’ qui est la visualisation, lors de l’inspiration, du courant de force entrant au niveau des talons et qui remonte jusqu’au cerveau, et à chaque expiration, du même courant qui part du cerveau pour sortir par le tronc. Par ce moyen se forme dans le centre de la tête un aliment divin qui ira nourrir la graine d’immortalité déposée dans le centre de l’eau. Cette graine sera stimulée par une autre série d’exercices complexes.

6 signes se manifestent lorsque la graine d’immortalité dûment nourrie est à maturité : audition du sifflement du dragon dans l’oreille droite, du tigre dans l’oreille gauche, vision d’une lumière dorée dans le centre de la tête, sensation d’un feu allumé dans le centre de l’eau, la nuque vibre, le pénis se rétracte sur lui-même.

L’alchimiste arrivé à ce stade doit se garder de s’adonner à un des ‘7 attachements’, à un des ‘10 excès’ et à un des ‘9 modes de respiration déréglés’. Puis viennent la recherche et l’assemblage des ‘4 nécessités de l’alchimie’ : l’argent (de façon très pratique pour se nourrir), les amis alchimistes, un lieu convenable et les objets qui consistent en une baguette de bois arrondie et recouverte de coton pour bloquer l’anus, et une patère à placer devant les narines.

Dans le lieu convenable et entouré de ses amis, l’alchimiste doit se concentrer sur le centre du bas ventre, le centre de l’eau et de ‘secouer les 6 organes des sens’ : le nez, les oreilles, les yeux, la langue, le mental et le pénis.

L’Immortalité ou la course de la semence d’immortalité dans le corps de l’alchimiste ainsi s’éveille dans les testicules « la semence d’immortalité » qui s’efforcera de sortir par le pénis. L’issue ayant été fermée par des exercices précédemment accomplis, elle se dirige vers l’anus où la baguette de bois empêche toute sortie. La semence remonte alors le long de l’épine dorsale. Lorsqu’elle approche du coccyx, l’homme ‘ouvre’ l’épine en pratiquant les ‘5 dragons soutiens de la sainteté’ : en appuyant fortement le doigt à la base du pénis, en faisant rouler ses yeux, en aspirant l’air profondément, en enfonçant sa langue dans son palais, en étirant le creux de ses reins.

En même temps, un de ses amis lui pince le bas de l’échine si bien que la semence peut de frayer un chemin au travers de la première ‘porte de l’épine dorsale’. Elle traversera ensuite l’épine à travers 2 autres portes pour parvenir à un centre psychique situé derrière la tête.

Aussitôt, l’alchimiste doit décrire une série de cercles avec ses yeux en contemplant la lumière intérieure qui lui apparaît à ce stade.

La patère placée devant les narines empêche ici que la semence ne sorte par le nez.

La semence se dirige alors vers une cavité psychique située au-dessus des narines et où elle se matérialise sous forme de salive qui doit alors redescendre tout le corps jusqu’au centre du bas ventre. »

Elle y restera et le Grand Œuvre est accompli, l’alchimiste a obtenu l’immortalité.

Le texte ci-dessus est évidemment adressé aux hommes. Il parait qu’il y eu aussi des techniques équivalentes pour arrêter les règles chez la femme (« L’art de décapiter le Dragon Rouge ») ce qui aboutissait au même résultat : l’immortalité.

Plus sur le sujet :

L’Alchimie Sexuelle Chinoise, recette de l’Immortalité par Mystiik, 2006. Article écrit pour le Forum Alliance Magique.

Sources et pour en savoir plus :

  • Les alchimistes, M.Caron et S.Hutin, Le Temps qui court ed., 1959
  • Esotérisme et sexualité, Francis King, Petite Bibliothèque Payot ed, 2004 d’où sont largement extraits les citations et l’interprétation résumée des techniques de l’alchimie sexuelle chinoise, traduite de Taoist Yoga, Alchemy and Immortality en anglais par Charles Luk (Lu Kuan Yu) , Weiser Books ed, 1990.
  • La vie sexuelle dans la chine ancienne, Robert Van Gulik, Gallimard ed (TEL), 1987
  • Taoisme et sciences chinoises de Philippe CHE – en .pdf téléchargeable sur le Net.
  • Voir aussi Le dragon rouge de J.P. Krasensky (que je n’ai pas lu mais qui semble aborder la question de l’alchimie sexuelle chinoise féminine).

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