Martinez de Pasqually par Constant Chevillon.Â
Lâhomme dont je veux aujourdâhui vous retracer lâexistence visible, la doctrine et les rĂ©alisations, a traversĂ© le monde comme un mĂ©tĂ©ore. Un voile opaque recouvre ses origines et lâabsorbe Ă lâheure de sa mort. On ignore Ă peu prĂšs tout de ses antĂ©cĂ©dents et sa postĂ©ritĂ© semble sâĂȘtre engloutie avec lui dans un tombeau inconnu.
Cet homme, câest Dom Martinez de Pasqually, plus connu dans les milieux occultistes sous le nom de Martinez Pasqually. Est-ce lĂ son vĂ©ritable patronyme ? On lâignorera probablement toujours, car Martinez, pour dĂ©pister les curieux sâest dĂ©cernĂ© lui-mĂȘme mille identitĂ©s diverses. Il sâest fait appeler aussi Jacques Delivron, Joachim de la Tour, de la Case, de las Cases ou de las Casas… Son nom est aussi protĂ©iforme que son esprit, mais historiquement, il est et restera Martinez de Pasqually.
Jamais peut-ĂȘtre au cours des Ăąges, une floraison dâilluminisme comparable Ă celle du XVIIIĂšme siĂšcle nâavait Ă©tĂ© enregistrĂ©. On vit tour Ă tour, ou simultanĂ©ment : St Germain, Cagliostro, Dom Pernetty, Falck, Swedenborg, Weishaupt, lâElias Artista de Hambourg, le groupe des PhilalĂšthes, et cent autres… Des princes et des rois comme FrĂ©dĂ©rick de Prusse et Stanislas-Auguste de Pologne versĂšrent dans la science sacrĂ©e. Mais parmi ses figures titanesques de lâOcculte, aucune nâeut le relief et lâĂ©clat de Martinez de Pasqually.
Quel Ă©tait donc cet homme Ă©trange et mystĂ©rieux ? Mille lĂ©gendes ont couru et courent encore sur son compte. Sa race a Ă©tĂ© fortement discutĂ©e. On a prĂ©tendu quâil Ă©tait juif ou dâextraction sĂ©mitique orientale, portugais, espagnol, italien, allemand et enfin français. Ătait-il juif ?
Les tenants de lâopinion ont exploitĂ© comme preuve Ă lâappui le fait que son prĂ©nom Ă©tait Joachim et que son habitat prolongĂ© Ă Bordeaux se situait dans la rue judaĂŻque, qui Ă©tait une sorte de ghetto. Câest un raisonnement simpliste et sans consistance, dâautant plus que Martinez protesta toujours de sa catholicitĂ©, quâil se maria Ă lâĂglise catholique, quâil fit baptiser ses enfants et quâil montra en diverses occasions ses billets de confession.
Ătait-il de famille juive convertie ?
Câest possible, mais rien ne le prouve et lâĂ©noncer est une assertion gratuite.
Ătait-il français ?
Câest aussi improbable, car sa façon maladroite de manier notre langue – ce qui lui est vĂ©hĂ©mentement reprochĂ© par les voix de la critique – prouve le contraire. Il Ă©tait trĂšs probablement espagnol. Ceci rĂ©sulte de la patente maçonnique dĂ©livrĂ©e Ă son pĂšre par la grande Loge de Stuart en 1738, dont une copie fut dĂ©posĂ©e Ă la Grande Loge de France en 1763 par Martinez de Pasqually lui-mĂȘme. DâaprĂšs cette patente, le pĂšre de Martinez portait le titre d’Ăcuyer et Ă©tait nĂ© Ă Alicante en 1671… Et ceci serait corroborĂ© par les connaissances kabbalistiques approfondies de notre illuminĂ©, car lâEspagne reste la patrie incontestable de la Kabbale moderne.
LâannĂ©e de sa naissance est assez controversĂ©e, mais il est probable quâelle se situe dans lâannĂ©e 1710. Il naquit Ă Grenoble, ou tout au moins dans la rĂ©gion dauphinoise… DâoĂč la tendance de certains historiens Ă le proclamer français.
Sa vie en quelque sorte publique est postĂ©rieure Ă 1750. Nous nâavons aucun renseignement sur la formation et les occupations de Martinez de Pasqually avant cette date. Ses disciples, mĂȘme les plus aimĂ©s, comme lâAbbĂ© FourniĂ©, de Grainville, Saint Martin, Willermoz, ont tout ignorĂ© de cette pĂ©riode. Aussi la lĂ©gende eut et a beau jeu… On a fait voyager Martinez de par toute la terre.
Il serait retournĂ© en Espagne (câest probable, mais pas prouvĂ©), il aurait visitĂ© lâItalie, lâAllemagne et les pays scandinaves, lâAngleterre, le proche, le moyen et lâExtrĂȘme-Orient… On a prĂ©tendu, et Papus sâen est fait personnellement lâĂ©cho, quâil aurait Ă©tĂ© initiĂ© Ă Londres par Swedenborg. Or de tout ceci, rien nâest certain et aucun document historique ne peut-ĂȘtre fourni Ă lâappui de la moindre assertion. Lâinitiation swedenborgienne en particulier a Ă©tĂ© inventĂ©e de toutes piĂšces. Des recherches multiples ont Ă©tĂ© effectuĂ©es et aucune trace de la venue de Martinez de Pasqually Ă Londres nâa Ă©tĂ© dĂ©couverte. Du reste, les similitudes de doctrines constatĂ©es entre le martinĂ©zisme et lâĂglise du prophĂšte du Nord, sâexpliquent facilement… Elles sont basĂ©es toutes deux sur la commune tradition retrouvĂ©e et rĂ©novĂ©e Ă cette Ă©poque. Les occultistes savent Ă quoi sâen tenir et pas est besoin de faire appel ici Ă un contact entre les deux illuminĂ©s. Lâesprit critique de Papus a Ă©tĂ© singuliĂšrement en dĂ©faut, dans ce cas comme dans plusieurs autres. Bref, de tous les voyages, plus ou moins imaginaires que lâon prĂȘte Ă Martinez, un seul ne peut ĂȘtre sujet Ă caution, câest celui quâil fit en Chine… Car il dit en propres termes dans son traitĂ© de la rĂ©intĂ©gration quâil a vu par lui-mĂȘme les craintes des Chinois au sujet de certains ĂȘtres hideux, vraisemblablement des dragons.
Ă partir de 1754, Martinez avait alors 40 ans, son passage est relatĂ© dans plusieurs villes du sud-est de la France. Il Ă©tait alors en possession de ses thĂ©ories principales, sinon « in extenso » et nettement formulĂ©es par Ă©crit, du moins en puissance dans son esprit… Il commençait son apostolat, sa mission initiatique. On le voit tour Ă tour Ă Marseille, Avignon, Montpellier, Narbonne, Foix et Toulouse. On sait quand il arrive, on ne sait pas dâoĂč il vient… On le voit partir, on ne sait pas oĂč il va… Câest le mystĂšre qui continue. En chaque ville oĂč il sâarrĂȘte, Martinez frĂ©quente les Loges maçonniques et lĂ , il prĂȘche sa doctrine, recueille des adhĂ©rents pour son Ordre des Ălus Cohens. Nous verrons tout Ă lâheure la teneur des doctrines et le fonctionnement du Rite des Ălus Cohens… Câest Ă dire des prĂȘtres Ă©lus. En 1762, il est Ă Bordeaux… Câest lĂ quâil va sâĂ©tablir et que pendant 10 ans, il rayonnera son influence, soit directement par lui-mĂȘme, soit indirectement par ses disciples sur une grande partie de lâOccident EuropĂ©en. DĂšs son arrivĂ©e, il sâaffilie Ă la Loge « La Française », la seule alors en activitĂ© dans la ville. Il va la rĂ©nover, lui insuffler son esprit et lui donner de nouvelles constitutions sous le nom de la « Française Elue et Ecossaise ». Il la fera agrĂ©er par la Grande Loge de France en 1765 et Ă©tablira en France, au moins, une dizaine de Temples Cohens sans compter les groupes incomplets. Ses disciples sont nombreux et de qualitĂ©, car il sâadresse Ă la seule Ă©lite. Citons parmi eux de Grainville, de Lusignan, Saint Martin, Bacon de la Chevalerie, Willermoz, de SĂ©gur, lâabbĂ© FourniĂ©, lâabbĂ© Rosier, Cazotte, du Chanteau, dâHolbach, du Ray dâHauterive, le prince de Hesse-Cassel, Lavalette de Lange, le baron de Gleichen, etc., etc.
En 1767, Martinez donne Ă son Ordre une forme administrative en crĂ©ant le suprĂȘme tribunal de Paris avec Bacon comme substitut, de Loos, du Guers, de Lusignan et Faugier. Cette mĂȘme annĂ©e, il se marie avec la niĂšce dâun ancien major du rĂ©giment de Foix, Melle de Colas de Saint Michel qui lui donna deux fils, lâun en 1768, lâautre en 1771. Mais ces deux enfants disparurent probablement pendant la pĂ©riode rĂ©volutionnaire, sans laisser de traces. LâannĂ©e 1768 fut particuliĂšrement brillante pour lâOrdre des Ălus Cohens. Ă cette date, en effet, L.C. de Saint Martin entre dans lâintimitĂ© de Martinez et J.B. Willermoz est ordonnĂ© RĂ©aux-Croix par Bacon de la Chevalerie. Lâinfluence de ces deux hommes fut Ă©norme, car par eux, lâenseignement du MaĂźtre a Ă©tĂ© transmis Ă la postĂ©ritĂ©. Les annĂ©es suivantes furent moins fĂ©condes et surtout plus agitĂ©es. En 1769, du Guers, un des disciples favoris de Martinez, se rĂ©volte contre lui et le couvre dâopprobres…, il faut mĂȘme aller devant la Justice pour mettre fin aux calomnies et aux accusations tendancieuses. Lâexpulsion de du Guers ne ramena pas pour autant la paix…, les adeptes, et surtout les R+ se plaignent amĂšrement dâĂȘtre laissĂ©s sans directives et de tout ignorer des doctrines suprĂȘmes dont la rĂ©vĂ©lation leur a Ă©tĂ© promise. Ils rĂ©clament souvent avec vĂ©hĂ©mence, Bacon de la Chevalerie en tĂȘte, qui reprend Ă son compte les attaques de du Guers. La raison de cette levĂ©e de boucliers est simple et quelque peu plausible. Martinez, malgrĂ© son gĂ©nie initiatique, travaille par tempĂ©rament dans lâincohĂ©rence et il exprime difficilement ce quâil conçoit Ă la perfection. Il a donc nĂ©gligĂ© de rĂ©diger ses enseignements essentiels… Il ne laisse apercevoir Ă ses disciples anxieux que des lueurs dans la nuit. La lutte est longue et parfois douloureuse, mais Martinez finit par sâimposer. Il rĂ©agit contre son indolence naturelle… Les instructions se suivent plus rĂ©guliĂšrement, et Willermoz en particulier se voit gratifiĂ© dâune volumineuse correspondance cĂ©rĂ©monielle. Puis en 1771, St Martin quitte dĂ©finitivement la carriĂšre militaire, il devient le secrĂ©taire de Martinez. Sous lâimpulsion de cet esprit ordonnĂ©, de cette intelligence lucide, le maĂźtre travaille pour ainsi dire, jour et nuit. Les rituels des divers grades sont Ă©crits, les catĂ©chismes paraissent, et le livre de la rĂ©intĂ©gration des ĂȘtres, cet exposĂ© parfois magistral et souvent nuageux de la doctrine martinĂ©ziste, est mis en chantier. Sa rĂ©daction, hĂ©las, est interrompue par le dĂ©part de Martinez, et il ne lâa jamais achevĂ©. En 1772, en effet, Martinez sâembarque pour St Domingue. Il devait y recueillir un hĂ©ritage. Il avait dans cette Ăźle des parents plus ou moins proches, mais leur identitĂ© est restĂ©e inconnue et personne nâa jamais tentĂ© de sonder le mystĂšre de cette parentĂ© qui eut pu sans doute jeter quelque lumiĂšre sur les origines du MaĂźtre. A St Domingue, Martinez continue son prosĂ©lytisme. Il crĂ©a Ă Port-au-Prince, 1773, un tribunal souverain analogue Ă celui de Paris avec Coignet de LestĂšve comme substitut gĂ©nĂ©ral. Plusieurs Temples furent créés, notamment Ă LĂ©ogane. Mais, Ă©puisĂ© par son effort, et peut-ĂȘtre aussi par le climat, il fut pris par les fiĂšvres et mourut le 20 septembre 1774 en dĂ©signant pour ses successeurs Ă la tĂȘte de lâOrdre des Ălus Cohens, Coignet de LestĂšve. Mourut-il Ă Port-au-Prince, Ă LĂ©ogane ou ailleurs… Nul ne le sait, et en tout cas le lieu de sa sĂ©pulture nâa jamais Ă©tĂ© identifiĂ©.
Telle fut la vie de Martinez de Pasqually dans ce quâelle a dâhistorique. Il a donc bien traversĂ© le ciel de lâilluminisme comme un mĂ©tĂ©ore, son lieu dâorigine Ă©vident, sans terme dâaboutissement. Mais il reste de lui sa doctrine et son Ordre des Ălus Cohens. Tous les historiens sont allĂ©s prĂŽnant que les Ălus Cohens nâexistaient plus…, avaient disparu avec Willermoz… Ils se sont trompĂ©s et se trompent… LâOrdre de Martinez a existĂ© sans interruption jusquâĂ nos jours, et il est encore bien vivant Ă lâheure actuelle. Seulement, nos modernes R+ sont des silencieux… Ils se connaissent entre eux, et personne ne les connaĂźt, les historiens profanes de lâĂ©sotĂ©risme moins que tout autre. Certes, leurs doctrines et leurs pratiques ne sâidentifient pas de façon absolue avec celles du XVIIIĂšme siĂšcle, car ils ont assimilĂ© 150 ans de sciences positives, mais les enseignements donnĂ©s par Martinez restent les colonnes de leur Temple et le but de jadis est toujours leur Ă©toile flamboyante.
Quelle fut donc la doctrine de Martinez de Pasqually et oĂč la trouverons-nous ?
Elle est contenue dans trois sĂ©ries de documents qui sont : Les rituels de lâOrdre des Cohens… Les lettres fort longues et explicites Ă©crites Ă Willermoz… Son traitĂ© De la rĂ©intĂ©gration des ĂȘtres.
Je ne vous parlerai pas des premiers ni des seconds. Ces documents prĂ©parent en effet les adeptes Ă lâintelligence et Ă la rĂ©alisation des opĂ©rations thĂ©urgiques… et il ne mâappartient pas, en ce lieu, et en ce moment, de vous guider dans cette voie. Mais la doctrine du MaĂźtre, celle exposĂ©e tout au long de son traitĂ© De la rĂ©intĂ©gration des ĂȘtres, est dâordre universel et nâest pas lâapanage de tel ou tel individu… elle appartient Ă lâhumanitĂ© toute entiĂšre. Le traitĂ©, du reste, a Ă©tĂ© publiĂ© de façon intĂ©grale dans un texte qui semble sâĂ©carter quelque peu de sa version originale, mais qui, nĂ©anmoins, la laisse transparaĂźtre dans toute son ampleur. Nous allons dâabord, si vous le voulez bien, en Ă©tablir le schĂ©ma… puis nous en examinerons le dĂ©veloppement et je vous en donnerai un court extrait pour vous familiariser avec la maniĂšre du MaĂźtre qui nâest pas ordinaire et demande au dĂ©butant une attention plus que soutenue.
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Le traitĂ© De la RĂ©intĂ©gration, en effet, est Ă©crit en un style apocalyptique, sans syntaxe et sans construction… preuve Ă©vidente que Martinez de Pasqually, nĂ© en un siĂšcle oĂč la langue littĂ©raire Ă©tait tout particuliĂšrement chatiĂ©e et impeccable, nâĂ©tait pas dâextraction française. De plus, on nây trouve, ni plan dâensemble, ni division, ni suite logique des idĂ©es. LâexposĂ© des doctrines est toujours incomplet et laisse entrevoir des sous-entendus gros de consĂ©quences. Souvent pour ne pas dire toujours, la solution dâun problĂšme est sĂ©parĂ©e des prĂ©misses par des pages et des pages Ă premiĂšre vue sans portĂ©e. LâĂ©tude de cet ouvrage est Ăąpre pour tous, elle est hors des possibilitĂ©s dâun lecteur superficiel, mais, par instant, des Ă©clairs fulgurants, des traits de LumiĂšre insondable terrassent lâintelligence et montrent le gĂ©nie du rĂ©dacteur. Câest le type mĂȘme du livre hermĂ©tique.
Que contient donc ce traitĂ© Ă la fois merveilleux et cachĂ© ? La prĂ©varication et la chute de l’esprit.
La prĂ©varication et la chute de lâhomme dans la matiĂšre. Lâhistoire du monde consĂ©cutive Ă ces chutes successives.
Lâexplication transcendante du Mal et la puissance corrĂ©lative des forces mauvaises…, puis, pour couronner cette dramatique genĂšse de lâUnivers visible et invisible, il expose la possibilitĂ© et la nĂ©cessitĂ© de la rĂ©intĂ©gration hominale, c’est-Ă -dire le retour de la race humaine dans un Ă©tat primitif de saintetĂ©, de Gloire et de puissance antĂ©-catabolique. Ici, prĂ©cisĂ©ment, interviennent les documents dont je vous parlais tout Ă lâheure et qui, tout en dĂ©veloppant sous des voiles adĂ©quats les mĂȘmes thĂ©ories, donnent les raisons et les moyens de ce retour Ă notre premier Ă©tat dâĂ©manation.
Ce simple exposĂ© indique avec Ă©vidence la source des inspirations de Martinez. Il a puisĂ© dans la tradition universelle transmise aux constructeurs de cosmogonies…, Ă MoĂŻse, comme aux autres. Mais il dĂ©passe singuliĂšrement tous les systĂšmes dĂ©veloppĂ©s avant lui-mĂȘme, mĂȘme le Pentateuque. Il prend lâoeuvre divine Ă son origine elle-mĂȘme, au moment des Ă©manations spirituelles…, il entrevoit la chute des Esprits, câest Ă dire la catabole lucifĂ©rienne.
Puis, il dĂ©crit et commente la catabole Ă©dĂ©nale, non seulement dans ses consĂ©quences purement matĂ©rielles, mais dans son essence spirituelle en abordant le problĂšme du Mal…, et non content de ces constatations, quâon peut qualifier de pseudo-historiques sans en affaiblir la rĂ©alitĂ©, il aperçoit le cycle de rĂ©versibilitĂ© qui permettra Ă lâhomme de transposer sa chute verticale en courbe parabolique pour rĂ©intĂ©grer la sphĂšre des Ă©manations divines.
Examinons maintenant les dĂ©tails de lâenseignement du MaĂźtre. Au dĂ©but de la cosmogonie, nous assistons Ă la premiĂšre Ă©manation des essences spirituelles. Ces essences, et ici, je commente moi-mĂȘme, car Martinez nâen dit pas tant…, ces essences sont la projection des IdĂ©es de Dieu… leur extĂ©riorisation est menĂ©e Ă lâexistence par sa VolontĂ© toute puissante. Elles sont donc, non pas identiques, mais analogues Ă Dieu. Leur potentialitĂ© est divine et par consĂ©quent, les actes quâelles sont appelĂ©es Ă rĂ©aliser seront des actes divins. Mais ces actes nâauront de valeur effective quâavec le concours de Dieu…. la puissance Ă©manĂ©e Ă©tant en vertu de la force centripĂšte, entiĂšrement au centre dâĂ©manation. Elles agiront donc selon la norme prĂ©vue et Dieu animera leurs actes de son souffle personnel…, il y aura collaboration intime et voulue. Ainsi pourraient ĂȘtre Ă©manĂ©s dâautres ĂȘtres spirituels…, les essences premiĂšres engendreront une postĂ©ritĂ© soumise au Principe Emanateur…, et lâorgueil sâempara de certains Ă©lĂ©ments Ă©manĂ©s. Pesant toute la puissance quâils avaient reçue, ils conçurent le projet dâĂ©maner par eux-mĂȘmes sans la collaboration divine, pour devenir, comme Dieu, des centres radiants de Gloire et de Vie Spirituelle. Ils entrĂšrent en action, mais Dieu tua dans lâoeuf leur rĂ©alisation en sâabstenant dây participer. Les essences rebelles avaient Ă©manĂ© des ĂȘtres de raison sans vie et sans puissance qui les alourdirent et les prĂ©cipitĂšrent du monde divin, du monde des rapports et des nombres vivants dans le monde des rapports et des nombres morts…, et ce monde devint leur gĂ©henne et leur prison.
Alors Dieu divisa les essences fidĂšles selon leur degrĂ© de puissance, en deux clans…, les esprits supĂ©rieurs qui reçurent en partage la sphĂšre sur-cĂ©leste, et les esprits majeurs qui habitĂšrent la sphĂšre cĂ©leste, tous deux en rapport direct et harmonieux avec la sphĂšre divine. Puis, pour mettre un sceau, un verrou infrangible, entre le ciel et la sphĂšre terrestre, prison des esprits dĂ©chus, il crĂ©a un esprit mineur, lâAdam Spirituel chargĂ© de surveiller et de contrĂŽler les exilĂ©s. Or, lâAdam Spirituel, en un plan surbaissĂ©, avait nĂ©anmoins toutes les qualitĂ©s du supĂ©rieur et du majeur…, il voyait Dieu face Ă face et lui parlait familiĂšrement…, il pouvait oeuvrer en accord avec Lui et procrĂ©er Ă son tour une postĂ©ritĂ© spirituelle sans borne et sans fin, animĂ©e comme lui-mĂȘme du Souffle Divin.
Malheureusement, le Mineur se laissa tromper par ceux quâil Ă©tait chargĂ© de contrĂŽler et de maintenir en dehors de la sphĂšre cĂ©leste. La catabole lucifĂ©rienne se renouvela. Adam voulut lui aussi crĂ©er, non pas des essences spirituelles en accord avec Dieu, mais des ĂȘtres semblables Ă lui et qui lui seraient soumis et lui obĂ©iraient comme il obĂ©issait lui-mĂȘme Ă son CrĂ©ateur. Et comme les essences premiĂšres, il Ă©mana des corps sans Ăąme et sans Gloire, des formes matĂ©rielles qui le happĂšrent de leurs tentacules et lâentraĂźnĂšrent dans la sphĂšre terrestre. La matiĂšre Ă©tait créée et consolidĂ©e autour de la race humaine. Mais si lâesprit mineur Ă©tait devenu, par sa rĂ©bellion consciente et dĂ©libĂ©rĂ©e, un homme engluĂ© dans la matiĂšre, et par lĂ privĂ© des prĂ©rogatives cĂ©lestes, le courroux de Dieu ne sâappesantit pas irrĂ©mĂ©diablement sur lui. Il sâĂ©tait laissĂ© sĂ©duire et câĂ©tait lĂ , pour employer notre moderne langage, une circonstance attĂ©nuante. Il obtint donc son pardon conditionnel et il eut dĂ©sormais pour mission de vaincre les puissances matĂ©rielles et de se rĂ©intĂ©grer dans sa situation premiĂšre. Il devait donc procrĂ©er une race, selon sa norme nouvelle, qui fut susceptible, avec le concours de Dieu, de supprimer la dĂ©chĂ©ance attachĂ©e Ă la forme humaine. Malheureusement, Adam et Eve, entraĂźnĂ©s par la nouveautĂ© des sensations matĂ©rielles, sâabandonnĂšrent Ă leur emprise, et la race de CaĂŻn en rĂ©sulta…, ils retardĂšrent ainsi leur Ă©volution. Les excĂšs des CaĂŻnistes amenĂšrent chez eux une salutaire rĂ©action et ils sollicitĂšrent la collaboration divine qui fut entiĂšrement efficace dans la procrĂ©ation dâAbel. Celui-ci fut revĂȘtu par Dieu de toutes les vertus spirituelles nĂ©cessaires Ă la complĂšte rĂ©intĂ©gration. HĂ©las, la spiritualitĂ© dâAbel Ă©tait trop haute pour ne point porter ombrage Ă CaĂŻn, lâhomme passionnel, et comme sa forme matĂ©rielle le rendait vulnĂ©rable, son frĂšre lâassassina. Tout Ă©tait Ă recommencer.
Adam et Eve procréÚrent donc Seth et sa lignĂ©e, mais sur un plan mitoyen qui maria la spiritualitĂ© Ă la matiĂšre…, or les descendants de Seth, entraĂźnĂ©s par cette derniĂšre, sâunirent aux enfants nĂ©s de CaĂŻn, et notre actuelle humanitĂ© fut le rĂ©sultat de cette malheureuse union. La dĂ©chĂ©ance, au lieu de se rĂ©sorber, sâaccentua…, les hommes enorgueillis par leur puissance sur les forces tangibles du Cosmos, devinrent peu Ă peu ce quâils sont aujourdâhui. Ils se ruĂšrent vers les rĂ©alisations phĂ©nomĂ©nales, sâattachĂšrent aux jouissances corporelles, sâĂ©lançant parfois Ă lâassaut dâune spiritualitĂ© en dĂ©saccord avec les principes immuables fixĂ©s par le CrĂ©ateur, pour retomber lourdement dans les griffes de la sensualitĂ©.
Or, Martinez, au lieu de se laisser emporter par une vague de pessimisme, nous ouvre ici une fuite vers un chemin. Rares parmi les hommes, quelques unitĂ©s pourtant, ont conservĂ© les connaissances du mineur ancestral et travaillent inlassablement Ă nous restituer notre libertĂ© spirituelle. Ainsi, un lien est restĂ© entre la sphĂšre terrestre et les sphĂšres cĂ©lestes et sur-cĂ©lestes. Il y a toujours un moyen de reconquĂ©rir les privilĂšges divins de notre race. Les explications du MaĂźtre Ă ce sujet sont parfois fort claires, dâautres fois, elles sont Ă peine claires et indiquĂ©es et deviennent nĂ©buleuses… mais Ă travers le voile de ses phrases, le plus souvent boiteuses, on aperçoit assez nettement – celui du moins qui possĂšde la volontĂ© de savoir Ă tout prix – le moyen dâarriver au but… et ce but, Martinez en parle comme de lâ« Ăther vital », « axe central », « Feu incréé » et des moyens de lâutiliser pour des opĂ©rations thĂ©urgiques. LâAxe Central, câest lâAgent de la RĂ©intĂ©gration…, cet agent conduit Ă la « Chose ». La Chose, câest le signe certain que la rĂ©intĂ©gration est acquise… câest le prodrome de lâIllumination et de la bĂ©atitude. Comment par lâAgent arriver Ă la Chose ?… câest lĂ le secret des opĂ©rations thĂ©urgiques de Martinez, secret qui appartient Ă son ordre, dans son ordre, aux seuls R+. Ce secret a Ă©tĂ© jusquâĂ maintenant bien gardĂ©. Certains auteurs ont voulu le percer Ă lâaide de documents tombĂ©s dans leurs mains et ils se sont moquĂ©s plus ou moins spirituellement des efforts de Martinez et des R+… eh, bien…, ils se sont trompĂ©s et en sont pour leur frais dâesprit. Ils nâont pas compris parce quâils ont voulu pĂ©nĂ©trer par violence dans un sentier qui demande une longue marche dâapproche… ils ont voulu voir une LumiĂšre subtile sans prĂ©parer leurs yeux Ă la discerner…, ils ont voulu parvenir Ă la coupole du Temple sans emprunter lâescalier qui permet dâen faire lâascension. Câest lĂ du reste, lâhĂ©ritage de tous les exĂ©gĂštes qui veulent sonder un texte Ă la seule lumiĂšre de la logique et de la raison sans se prĂ©occuper de lâambiance… sans se mettre en Ă©tat de rĂ©ceptivitĂ© vis-Ă -vis de la pensĂ©e Ă©ventuellement enfouie sous le voile des termes et des concepts.
Pour comprendre la doctrine de Martinez de Pasqually, et le bien-fondĂ© de ses opĂ©rations thĂ©urgiques, il faut autre chose quâune analyse, mĂȘme approfondie de ses oeuvres…, il faut se soumettre Ă la discipline physique, intellectuelle et morale…, il faut placer en fondation de lâascĂšse ultĂ©rieure : lâhumilitĂ©…, lâabnĂ©gation…, et la charitĂ©. Hors de cela tout est vain et tout effort est parfaitement stĂ©rile.
Je vais maintenant vous donner lecture dâun court passage du traitĂ© De la rĂ©intĂ©gration. Ce texte est particuliĂšrement caractĂ©ristique de la doctrine du MaĂźtre IlluminĂ© et de sa maniĂšre de sâexprimer. Il va illustrer tout ce que je viens de vous dire en y jetant un curieux rayon de lumiĂšre vive. Il sâagit de la prĂ©varication dâAdam et de ses suites jusquâĂ sa postĂ©ritĂ© actuelle ( Page 59 Ă 68 ):
« Adam et Eve, ayant Ă©prouvĂ© la peine cruelle dont nous venons de parler, et ne connaissant rien de positif que cet Ă©vĂ©nement annonçait, soit pour eux, soit pour la postĂ©ritĂ© premiĂšre et celle Ă venir, se prosternĂšrent dans la plus grande douleur et la plus grande Foi devant le Seigneur, pour lui demander grĂące et misĂ©ricorde du crime que CaĂŻn avait commis sur leur fils, Abel, nâayant en lui ni le pouvoir, ni la force de venger de leur propre autoritĂ© le sang du juste par lâeffusion de celui du coupable, et sachant bien que la vengeance nâappartient quâau CrĂ©ateur.
LâĂternel exauça les priĂšres et lamentations dâAdam et dâEve sur la mort de leur fils, Abel. Il leur envoya un interprĂšte spirituel qui leur apparut et leur expliqua le type du crime commis par CaĂŻn, en leur disant :
« …, Vous avez bien raison de regarder le meurtre dâAbel comme une perte considĂ©rable et comme une marque de la colĂšre de Dieu qui doit rejaillir sur vos descendants jusquâĂ la fin des siĂšcles. Vous devez encore la considĂ©rer comme un reste du flĂ©au de la justice divine pour lâentiĂšre rĂ©mission de votre premier crime, et pour votre parfaite rĂ©conciliation ; mais le CrĂ©ateur, qui a connu votre retour parfait et votre rĂ©signation, mâenvoie auprĂšs de vous pour calmer vos peines et vos larmes sur le malheureux Ă©vĂšnement que vous regardez comme irrĂ©parable. Le CrĂ©ateur vous dit par ma parole que vous nâavez lâun et lâautre produit cette postĂ©ritĂ© dâAbel que pour ĂȘtre le vrai type de celui qui viendra dans un temps, pour ĂȘtre le vĂ©ritable et lâunique rĂ©conciliateur de toute votre postĂ©ritĂ©. Sachez encore, lâun et lâautre, que CaĂŻn, que vous regardez avec raison comme criminel, ne lâest pas tant quâAdam lâa Ă©tĂ© envers le CrĂ©ateur. CaĂŻn nâa frappĂ© que la matiĂšre et Adam a pris le trĂŽne de Dieu par la force : voyez sâil est plus criminel que vous.
Votre fils CaĂŻn est encore un type de la prĂ©varication des premiers esprits qui ont sĂ©duit Adam et qui lui ont rĂ©ellement donnĂ© la mort spirituelle, en prĂ©cipitant son ĂȘtre mineur dans une forme de matiĂšre passive, ce qui lâa rendu susceptible de privation divine, et a changĂ© sa forme glorieuse en une forme matĂ©rielle sujette Ă ĂȘtre anĂ©antie, sans pouvoir ĂȘtre mise dans sa premiĂšre nature de forme apparente, aprĂšs sa rĂ©intĂ©gration dans le premier principe des formes apparentes, que lâaxe central dissipera aussi promptement quâil lâa formĂ©. Soyez fermes et persĂ©vĂ©rants dans votre confiance dans lâĂ©ternel ; le terme de votre rĂ©conciliation est rempli…
Adam répondit :
« …, que la volontĂ© de mon CrĂ©ateur soit la mienne… » Je vais entrer maintenant dans lâexplication des types vĂ©ritables que font tous les Ă©vĂ©nements que jâai racontĂ©s. Adam, par sa postĂ©ritĂ© temporelle, fait la figure du CrĂ©ateur…, et cette postĂ©ritĂ© dâAdam fait la figure des esprits que le CrĂ©ateur avait Ă©manĂ© de Lui pour sa plus grande Gloire et pour lui rendre un culte spirituel. Vous avez vu que ces esprits peuvent se considĂ©rer comme aĂźnĂ©s Ă Adam, ayant Ă©tĂ© Ă©manĂ©s avant lui. Vous savez aussi que ces esprits ayant prĂ©variquĂ©, lâĂternel les Ă©loigna de sa prĂ©sence, quâil Ă©mana et quâil Ă©mancipa de son ImmensitĂ© Divine un ĂȘtre spirituel mineur pour les contenir en privation, et que ce mineur que nous nommons Adam et RĂ©aux, nâĂ©tait par consĂ©quent que le second nĂ© spirituellement de ces premiers esprits, et quâil sortait, ainsi quâeux, du PĂšre Divin CrĂ©ateur de toutes choses.
Je veux donc faire observer que CaĂŻn, fils aĂźnĂ© dâAdam, est le type de ces premiers esprits Ă©manĂ©s par le CrĂ©ateur, et que son crime est le type de celui que ces premiers esprits ont commis contre lâĂternel. Abel, second nĂ© dâAdam, fait par son innocence et par sa saintetĂ© le type dâAdam Ă©manĂ© aprĂšs ces premiers esprits dans son premier Ă©tat de justice et de Gloire divines. Et la destruction du corps dâAbel, opĂ©rĂ©e par CaĂŻn, son frĂšre ainĂ©, est le type de lâopĂ©ration que les premiers esprits firent pour dĂ©truire la forme de gloire dont le premier homme Ă©tait revĂȘtu, et le rendre par ce moyen susceptible dâĂȘtre comme eux en privation divine. VoilĂ lâexplication certaine du premier type que font Adam, CaĂŻn et Abel, par les fĂącheux Ă©vĂšnements qui leur sont advenus.
Le second type que font ces trois mineurs nâest pas moins considĂ©rable, soit par le rapport quâils ont avec tout ĂȘtre corporel, cĂ©leste, gĂ©nĂ©ral et terrestre, soit par les Ă©vĂšnements quâils annonçaient devoir survenir Ă la postĂ©ritĂ© du premier homme. Pour sâen convaincre, il faut observer quâAdam, par les trois principes spiritueux qui composent sa forme de matiĂšre apparente, et par les proportions qui y rĂšgnent, est lâexacte figure du Temple gĂ©nĂ©ral Terrestre, que nous savons ĂȘtre un triangle Ă©quilatĂ©ral, ainsi quâon le verra physiquement par la suite. Adam avait en son pouvoir une vĂ©gĂ©tation corporelle, de mĂȘme quâil est de la nature de la Terre de vĂ©gĂ©ter. Adam nâa pu vĂ©gĂ©ter que deux sortes de vĂ©gĂ©tations : la masculine et la fĂ©minine. La terre ne peut Ă©galement produire que ces deux espĂšces de vĂ©gĂ©tations, soit dans les animaux passifs, soit dans les plantes et autres vĂ©gĂ©taux. Mais je vous apprendrais que, outre le pouvoir quâa le corps de lâhomme de se reproduire corporellement, il a encore celui de vĂ©gĂ©ter des animaux passifs, qui sont rĂ©ellement innĂ©s dans la substance de cette forme matĂ©rielle. Voici dâoĂč nous lâapprenons :
Lorsque lâĂȘtre-agent spirituel a quittĂ© sa forme, cette forme devient en putrĂ©faction. AprĂšs que cette putrĂ©faction est faite, il sort de cette forme corporelle des ĂȘtres que nous appelons reptiles qui subsistent jusquâĂ ce que les trois principes spiritueux, qui ont coopĂ©rĂ© Ă la forme corporelle de lâhomme, soient rĂ©intĂ©grĂ©s. Il ne faut pas croire que cette putrĂ©faction vienne dâelle-mĂȘme, ni directement de la forme corporelle, mais il faut savoir que le sĂ©minal de toutes choses sujettes Ă la vĂ©gĂ©tation est innĂ© dans lâenveloppe soit terrestre, soit aquatique. Ainsi le corps de lâhomme, Ă©tant provenu de la Terre gĂ©nĂ©rale et ayant innĂ©s dans sa forme de matiĂšre les trois principes qui ont coopĂ©rĂ© chez lui Ă former son enveloppe soit terrestre, soit aquatique, il nâest pas douteux quâil rĂ©side encore en cette forme particuliĂšre un sĂ©minal dâanimaux susceptibles de vĂ©gĂ©tation. Câest par ce sĂ©minal que la putrĂ©faction arrive dans les corps aprĂšs ce que lâon appelle vulgairement la Mort.
Les trois principes que nous appelons, Soufre, Sel et Mercure, opĂ©rant par leur rĂ©intĂ©gration, entrechoquent, par leur rĂ©action, les ovaires sĂ©minaux qui sont dans toute lâĂ©tendue du corps. Ces ovaires reçoivent encore par lĂ une nouvelle chaleur Ă©lĂ©mentaire qui dĂ©pouille lâespĂšce animale reptile de son enveloppe, et cette enveloppe ainsi dissoute, se lie intimement avec lâhumide grossier du cadavre. Câest la jonction de cette enveloppe des reptiles avec lâhumide grossier du cadavre qui opĂšre la corruption gĂ©nĂ©rale du corps de lâhomme et qui le met ensuite Ă sa derniĂšre fin de forme apparente. Câest donc toujours par la rĂ©action des trois principes opĂ©rants que provient la putrĂ©faction.
On peut vĂ©rifier ceci sur la forme dâun cadavre oĂč lâon verra opĂ©rer la vĂ©ritĂ© de ce que je dis en touchant la putrĂ©faction. (Mav Benach?).
Outre le type de la prĂ©varication des premiers esprits et celui de leur attaque victorieuse contre le premier homme, CaĂŻn fait encore le type de la sĂ©duction impie et funeste dont ces mauvais esprits useraient envers les futures postĂ©ritĂ©s dâAdam, ainsi quâil venait de la faire dans sa premiĂšre postĂ©ritĂ©. Nous le voyons dans le premier crime quâil commit sur son frĂšre Abel, et dans la sĂ©duction dont il usa envers ses propres soeurs, lorsquâil les engagea dâĂȘtre les tĂ©moins de ce quâil allait effectuer sur la personne de leur frĂšre, selon quâils avaient projetĂ© ensemble. CaĂŻn, aprĂšs sa prĂ©varication, fut obligĂ© dâaller vivre avec ses deux soeurs dans la partie du midi oĂč il fut relĂ©guĂ© Ă demeure fixe par lâordre du CrĂ©ateur et par lâautoritĂ© dâAdam. Câest lĂ le type du lieu oĂč les dĂ©mons ont Ă©tĂ© relĂ©guĂ©s pour ĂȘtre contraints dây opĂ©rer leur volontĂ© et leur intention malfaisante, soit contre le CrĂ©ateur, soit contre les mineurs des deux sexes, lâhomme et la femme Ă©tant susceptibles de retenir impression de lâintellect dĂ©moniaque. Ce lieu du Midi est encore le type de la partie universelle oĂč le CrĂ©ateur manifestera sa justice et sa gloire Ă la fin des temps. Câest aussi dans ces lieux que les justes manifesteront leurs vertus et puissances, Ă la honte des esprits pervers et Ă celle des mineurs rĂ©prouvĂ©s.
Cette partie mĂ©ridionale, ayant Ă©tĂ© maudite du CrĂ©ateur, et Ă©tant marquĂ©e par lâĂ©criture pour ĂȘtre lâasile des Majeurs et des mineurs qui auront prĂ©variquĂ©, je dirai de plus de ces trois personnages : CaĂŻn et ses deux soeurs, par leur nombre ternaire, annoncent la prĂ©varication de la forme corporelle terrestre de lâhomme que lâintellect dĂ©moniaque sĂ©duit par la jonction, quâil fait avec les trois principes spiritueux qui constituent toute forme corporelle.
Vous savez que le nombre ternaire est donnĂ© Ă la terre, oĂč Ă la forme gĂ©nĂ©rale, et aux formes corporelles de ses habitants, de mĂȘme quâaux formes des habitants cĂ©lestes. Ce nombre ternaire provient de trois substances qui composent les formes quelconques que nous nommons : les principes spiritueux qui sont le Soufre, le Sel et le Mercure qui Ă©manent de lâimagination et de lâintention du CrĂ©ateur. Ces trois produits ayant Ă©tĂ© produits dans un Ă©tat dâindiffĂ©rence, lâAxe Central les a disposĂ©s et les a opĂ©rĂ©s pour leur faire prendre une forme et une consistance plus consolidĂ©e ; et câest de cette opĂ©ration de lâAxe Central que proviennent toutes les formes corporelles, de mĂȘme que celles dont les esprits pervers doivent revĂȘtir pour leur plus grande suggestion.
Câest aussi par consĂ©quent, de ces mĂȘmes substances quâĂ©taient composĂ©es les formes corporelles de CaĂŻn et de ses deux soeurs dont nous expliquons maintenant le type. Au sujet du nombre neuvaire ( Ternario Formatur – nonenario dissolvitur) je dirai donc quâil nâest point Ă©tonnant que les esprits majeurs pervers et leurs agents se tiennent de prĂ©fĂ©rence et plus volontiers Ă la forme corporelle de lâhomme quâĂ tout autre, puisque cette forme humaine avait Ă©tĂ© premiĂšrement destinĂ©e pour eux. Nous voyons dâailleurs la preuve de lâultime liaison des esprits malins avec le corps de lâhomme dans les paroles que le Christ adressa Ă ses apĂŽtres, Ă la fin de sa derniĂšre opĂ©ration temporelle au jardin des Oliviers. Quand il fut revenu les rejoindre, il les trouva endormis et leur dit en les rĂ©veillant : « Ne dormez pas, car la chair est faible et lâesprit est prompt ». Câest par cette facilitĂ© avec laquelle lâesprit malin se communique Ă la forme corporelle de lâhomme que les trois personnes dont nous parlons laissĂšrent corrompre les principes spiritueux quâils avaient innĂ©s dans leur forme. Lâintellect dĂ©moniaque sâinsinua et se joignit entiĂšrement Ă la forme de ces trois mineurs ; et de lĂ parvint Ă sĂ©duire lâagent spirituel qui y Ă©tait renfermĂ© et qui devait diriger et gouverner cette forme au grĂ© du CrĂ©ateur. Cette insinuation produisit une telle rĂ©volution sur ces trois mineurs quâil ne fut plus en leur pouvoir de se dĂ©lier de lâintime correspondance qui rĂ©gnait entre eux ; par la parfaite sympathie quâils avaient contractĂ©e tous les trois avec lâintellect dĂ©moniaque., il nây avait entre eux quâune seule intention, quâune seule pensĂ©e et une seule action. On a jamais vu une pareille union parmi les hommes de tous les siĂšcles, et il est impossible que trois personnes diffĂ©rentes et libres agissent de la sorte, si elles ne sont conseillĂ©es et conduites par un bon ou un mauvais esprit.
Câest donc de ces trois personnes, possĂ©dĂ©es du Prince des dĂ©mons, que nous sortons, comme je lâai dit, le nombre neuvaire de matiĂšre, savoir : en additionnant les trois principes spiritueux et essences premiĂšres, leurs trois vertus et leurs trois puissances dĂ©moniaques, ainsi quâil suit :
1°- Trois principes à Caïn, trois à sa soeur aßnée, trois à sa soeur cadette = 9 .
2°- Trois vertus à Caïn, trois à sa soeur aßnée, trois à sa soeur cadette = 9. 3°- Trois Puissances à Caïn, trois à sa soeur aßnée, trois à sa soeur cadette = 9 .
Mais pour vous convaincre que le nombre neuvaire de matiĂšre sort de ses mineurs, il ne faut que voir leur opĂ©ration dĂ©moniaque, et comme ils ont perpĂ©tuĂ© leurs opĂ©rations criminelles jusquâau juste chĂątiment que le CrĂ©ateur exerça sur toute leur postĂ©ritĂ©, chĂątiment que lâĂcriture nous a fait connaĂźtre en nous apprenant que lâĂternel frappa toute la terre et ses habitants par le flĂ©au des eaux, et que, par ce moyen, la postĂ©ritĂ© coupable de ces trois mineurs, ainsi que les hommes quâils avaient sĂ©duits, furent anĂ©antis. Câest depuis cette Ă©poque que le nombre neuvaire est parvenu Ă la connaissance, de mĂȘme que la mystĂ©rieuse addition qui suit :
3 Additionnez le produit de tous ces 3 nombres qui est 27, vous y trouverez 3 2 et 7 font 9.
Multipliez 27 par 9, cela vous donnera 3 toujours 9. Si vous multipliez ce produit Ă lâinfini il vous reviendra toujours 9.
Câest lĂ ce que jâavais Ă vous dire sur le nombre neuvaire. Voulant vous faire connaĂźtre les autres types considĂ©rables que CaĂŻn fait encore dans cet Univers, je vous apprendrai que CaĂŻn fait le type de lâĂ©lection des prophĂštes que le CrĂ©ateur devait envoyer par la suite des temps parmi la postĂ©ritĂ© dâAdam. Il vous a Ă©tĂ© enseignĂ© que, lorsque CaĂŻn eut dĂ©truit lâindividu de son frĂšre Abel, il se retira dans sa demeure ordinaire, oĂč, Ă©tant Ă rĂ©flĂ©chir sur son crime, il lui survint une voix spirituelle divine qui lui demanda ce quâil avait fait de son frĂšre Abel. CaĂŻn rĂ©pondit brusquement : « suis-je le gardien de mon frĂšre ? ». AprĂšs cette rĂ©ponse, lâesprit lui fit une attraction si considĂ©rable, soit sur sa forme corporelle, soit sur son ĂȘtre mineur quâil fut aussitĂŽt terrassĂ© ; et dans cette situation, il se rĂ©clama Ă son CrĂ©ateur en disant : « Seigneur ! Ceux qui me rencontreront me tueront ». Ă cette considĂ©ration, lâĂternel, PĂšre de misĂ©ricorde, voyant la consternation de CaĂŻn et voulant le prĂ©server du reproche et de la vengeance que sa postĂ©ritĂ© aurait pu exercer contre lui, le fit marquer dâun sceau prĂ©servatif et lâesprit qui le marqua dit : « De par lâĂternel, quiconque frappera CaĂŻn de mort sera puni de mort sept fois ». CaĂŻn se retira ensuite avec ses soeurs dans le lieu qui lui avait Ă©tĂ© relĂ©guĂ©. Il eut dans cet endroit une postĂ©ritĂ© de dix mĂąles et de onze femelles. Il bĂątit dans cet endroit une ville quâil nomma HĂ©noch. Il imagina, pour coopĂ©rer Ă son entreprise, de fouiller dans les entrailles de la Terre, et il prĂ©para les matiĂšres quâil en retira afin de leur donner les formes convenables aux usages quâil voulait en faire, et fit cette opĂ©ration avec son premier-nĂ© quâil avait nommĂ© HĂ©noch. Il laissa son secret, soit pour la fonte des mĂ©taux, soit pour la dĂ©couverte des mines, Ă son fils nommĂ©, Tubal-Cain. Câest de lĂ quâil nous est venu que Tubal-CaĂŻn Ă©tait celui qui avait dĂ©couvert le premier la fonte des mĂ©taux.
