Maria de Naglowska, la Sophiale par Spartakus FreeMann. Ce court rush de la vie mouvementĂ©e de Maria de Naglowska, la Sophiale est inspirĂ© de lâouvrage de Marc Pluquet, La Sophiale.
Maria de Naglowska est née le 15 août 1883 à Saint-Pétersbourg. Elle perd ses parents trÚs jeune : son pÚre, un militaire de haut rang, sera empoisonné par un nihiliste et sa mÚre décédera en 1895.
Orpheline, elle est prise en charge par sa tante qui la placera dans un institut pour jeunes aristocrates. Elle y fera de brillantes études.
Les Ă©vĂ©nements et les idĂ©es rĂ©volutionnaires de 1905 ne la laissent pas indiffĂ©rente et elle commence Ă frĂ©quenter des cercles fermĂ©s dâintellectuels qui lui ouvriront les portes de la connaissance.
Maria tombe amoureuse dâun jeune musicien nommĂ© Hopenko. Les origines juives et le mĂ©tier de celui-ci interdisent toute union officielle aux deux amants. Ils quittent la Russie pour sâinstaller Ă Berlin puis en Suisse oĂč ils se marient. Maria y continue ses Ă©tudes universitaires en suivant des cours simultanĂ©ment dans plusieurs facultĂ©s. Pour faire subsister le couple et permettre Ă son mari de terminer sa formation de musicien, elle donne des cours particuliers. Câest Ă cette Ă©poque que naissent leurs trois enfants : Alexandre, Marie et AndrĂ©.
Hopenko séduit par les idées sionistes décide de partir pour la Palestine en laissant derriÚre lui sa femme et ses enfants.
Maria continue alors dâenseigner tout en se lançant dans le journalisme et en tenant des confĂ©rences. Mais ces activitĂ©s et la parution dâun livre lui valent dâĂȘtre emprisonnĂ©e pour activitĂ©s politiques et espionnage. Elle doit alors quitter GenĂšve pour Berne puis pour BĂąle.
Maria quitte ensuite la Suisse pour lâItalie oĂč elle sâinstalle Ă Rome. Elle se remet Ă enseigner et devient rĂ©dactrice du journal lâItalie. Elle fait alors venir ses enfants de Suisse, mais Alexandre part rejoindre son pĂšre en Palestine.
BientĂŽt les problĂšmes resurgissent : Maria perd son emploi et doit redonner des leçons Ă nâimporte quel prix pour survivre. Ă Rome, elle frĂ©quente un groupe dâĂ©crivains occultistes et câest dans ce milieu quâelle fait la connaissance dâun philosophe russe qui lui rĂ©vĂšle les traditions BorĂ©ennes les plus secrĂštes. Alexandre qui a rĂ©ussi Ă dĂ©crocher un bon poste Ă Alexandrie dans les Haras du roi, fait venir Maria, sa sĆur et son frĂšre. Maria y est vite conviĂ©e Ă faire des confĂ©rences organisĂ©es, entre autres, par la SociĂ©tĂ© ThĂ©osophique. Elle devient Ă©galement rĂ©dactrice pour le journal La Bourse dâAlexandrie.
En 1930, Maria revient Ă Rome, puis ses amis lui trouvent une place dans une maison dâĂ©dition Ă Paris oĂč elle part sâĂ©tablir. Malheureusement, elle nâobtient pas lâautorisation de travailler en France et doit compter sur son fils AndrĂ© pour survivre.
Elle sâĂ©tablit alors Ă Montparnasse oĂč elle fait la connaissance dâĂ©crivains, dâartistes et de poĂštes, et fait bientĂŽt Ă©diter un hebdomadaire magique : La FlĂšche. Maria traduit alors des textes de P.B. Randolph qu’elle publia comme sous le nom de Magia Sexualis (1931 au Lys d’Or).
Elle Ă©tablit alors ses quartiers Ă la Coupole oĂč se rĂ©unissent les occultistes de lâĂ©poque. La direction lui offre chaque soir un potage St-Germain et les nombreux cafĂ©s noirs quâelle avale Ă longueur de journĂ©e. Le mercredi, elle donne des confĂ©rences au studio Raspail et tous les aprĂšs-midi elle se rend Ă lâĂ©glise de Notre-Dame des Champs pour sây recueillir.
Maria de Naglowska commence à diffuser ses enseignements sur le TroisiÚme Terme. Nous reproduisons ici un article du journaliste Antoine Thibaud publié dans Paris-soir en 1932 :
Une Russe enseigne Ă Montparnasse la «âsainte doctrine sataniqueâ».
Mme de Naglowska nous dit ce quâest le «âTroisiĂšme Termeâ».
Mme de Naglowska, qui est Russe et promĂšne autour dâelle un regard continuellement inspirĂ©, attache vraiment foi en sa croyance, fait remarquable en un temps oĂč les sectes pullulent et oĂč la foi et le salut se vendent en sĂ©rie, en dehors des religions Ă©tablies, absolument comme la charcuterie, la confection ou la petite mĂ©canique.
Par Ă©crit et par la parole, elle sâefforce Ă rĂ©pandre ce qui est, selon elle, la religion, la doctrine, bref la vĂ©ritable orientation spirituelle de la race humaine : la saine doctrine satanique restituĂ©e au monde, par Ă©tapes, parce que la rĂ©vĂ©lation massive en serait funeste.
â Jâenseigne le troisiĂšme terme de la TrinitĂ© johannique, je livre Ă qui le mĂ©rite la clef magique du Saint des Saints.
Il y aura, et ceci nâest pas neuf, beaucoup dâappelĂ©s et peu dâĂ©lus. Ceux qui le mĂ©ritent.
Mme Maria de Naglowska, qui recherche lumiĂšres et bruits violents, source dâĂ©nergie, tient ses assises dans un grand cafĂ© de Montparnasse, oĂč elle reçoit ses visiteurs, rĂ©dige et dirige le journal dâaction magique dont elle est, sous diverses signatures, lâunique et intransigeante collaboratrice.
â Le mosaĂŻsme, premiĂšre rĂ©vĂ©lation.
Le christianisme romain, deuxiĂšme Ă©tapeâ; jâapporte le couronnement de lâinitiation, lâexplication dĂ©finitive du Grand MystĂšre.
Satan purificateur
Elle consent Ă mâindiquer la ligne gĂ©nĂ©rale de sa doctrine.
â Le grand arcane, câest le rite sacrĂ© de lâamour magique. Les vrais initiĂ©s pratiquent la messe dâor selon des rites et un rythme que je ne puis encore vous expliquer.
â Mais Satanâ?
â Nous y arrivons. Satan nâest nullement une puissance malĂ©fique, malgrĂ© la dĂ©plorable rĂ©putation quâon lui a faite.
â Pauvre diableâ!
â Ne plaisantez pas, câest trĂšs sĂ©rieux.
Satan figure lâĂ©lĂ©ment purificateur du pĂŽle nĂ©gatif, la colonne noire sur quoi sâappuie lâhomme. Ă la femme, pĂŽle positif, colonne blanche, lâInitiation divine suffit.
LâĂ©nergie du sexe, sublimĂ©e, intellectualisĂ©e selon les rites que jâindique dans un ouvrage Ă paraĂźtre bientĂŽt, en tirage limitĂ©. Ahâ! Ăa ne sâadresse pas Ă tout le mondeâ! Lorsque lâon saura cĂ©lĂ©brer vraiment la Messe dâOr, les vibrations nĂ©es du rythme Ă©panouiront enfin
lâintelligence humaine. Alors, ce sera la GrĂące, la vraie, la seule, celle que Satan seul peut confĂ©rer. Ăvidemment, une partie de la race humaine disparaĂźtra comme foudroyĂ©e. Il ne subsistera que les forts et nous parviendrons Ă des temps meilleurs.
â Sur quoi vous fondez-vousâ?
Mme de Naglowska, nouvelle VellĂ©da, affirme et discute peu, signe dâune folie vĂ©ritable. Mais le curieux câest lâorigine des dogmes nouveaux. Mme de Naglowska a Ă©tĂ© Ă©levĂ©e au collĂšge de Smolna, quâavait Ă©tabli, en 1796, Mme de Krudener, la mystique amie du tsar Alexandre 1er.
Lâinstruction y Ă©tait double : dâabord lâenseignement scolaire normal des 450 Ă©lĂšves, ensuite lâinitiation de quelques-unes dâentre elles aux secrets des mondes cachĂ©s, par un prĂȘtre nommĂ© Petroff, qui fut mĂȘlĂ© Ă la RĂ©volution russe de 1906 et qui hypnotisait ses catĂ©chumĂšnes et les enseignait par chant et par suggestion. Le reste provient dâune initiation satanique dont Mme de Naglowska ne mâa voulu dire quâune chose, câest quâelle est venue directement Ă la connaissance des hommes et quâelle la tenait en partie de la tradition maçonnique de certaines loges dâEurope centrale.
Bref, le Diable va sauver le monde. Attendonsâ! Quant Ă moi, je me bornerai Ă rĂ©pĂ©ter une jolie phrase de Heine : «âJe suis lâhomme le plus poli de lâunivers. Je ne fais jamais de commentaires.â»
â Jâai passĂ© toute ma vie Ă dĂ©fendre mes idĂ©es, conclut-elle, et vous ne trouverez pas mauvais quâaujourdâhui jâen tire quelque argentâ!
Ăvidemment non.
Antoine Thibaud. Paris-soir, 24 septembre 1932. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k7637661m
En 1935, Maria organise des rĂ©unions pour y prĂ©senter les rites prĂ©liminaires de la Messe dâOr :
- La consĂ©cration de lâAvĂšnement du TroisiĂšme Terme ;
- Lâordination des postulants au grade de Balayeur de la Cour ;
- Lâordination des postulantes au titre dâofficiantes mineures ;
- La consécration des rythmes alternés de la vie et de la mort ;
- La célébration de la TroisiÚme Naissance.
Ă la fin 1935, elle annonce Ă Marc Pluquet quâelle vient de terminer sa mission et quâelle prĂ©pare maintenant son dĂ©part. Elle prophĂ©tise que lâavĂšnement du TroisiĂšme Terme ne pourra se faire que dans deux ou trois gĂ©nĂ©rations quand le monde aura Ă©tĂ© prĂ©parĂ© par des bouleversements sociaux et politiques. La mission de ceux qui ont compris son Ćuvre sera de conserver son enseignement pour quâil puisse rĂ©apparaĂźtre sous une forme claire et comprĂ©hensible Ă des hommes et des femmes qui ne seraient pas forcĂ©ment formĂ©s au symbolisme.
Au dĂ©but de lâannĂ©e 1936, Maria donne une derniĂšre confĂ©rence au studio Raspail au terme de laquelle elle fait ses adieux Ă ses compagnons sans laisser de successeur attitrĂ©. Elle part alors rejoindre sa fille Marie en Suisse.
Le 17 avril 1936, Maria de Naglowska, la Sophiale de Montparnasse, dĂ©cĂšde chez sa fille Ă ZĂŒrich.
N’hĂ©sitez Ă continuer sur le sujet en lisant la Doctrine du TroisiĂšme Terme de la TrinitĂ© de Naglowska.
Maria de Naglowska par Spartakus FreeMann, 24 juillet 2001, extrait de l’article La Magia Sexualis mis Ă jour le 27 fĂ©vrier 2017.
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