Le Temple de Satan – Le Sorcier par Stanislas de Guaita.
PremiĂšre Septaine du Serpent de la GenĂšse : Le Temple de Satan.
Chapitre II : Le Sorcier
De tout temps, il sâest rencontrĂ© des hommes superstitieux et mĂ©chants, curieux des mystĂšres pour les profaner, jaloux de la Science pour en faire abus, ambitieux du pouvoir pour rĂ©gner dans le dĂ©sordre et par le crime. La Magie est apparue Ă ces pervers comme un triple instrument de tyrannie, de jouissance et dâintimidation â et ce rĂȘve impie dâun despotisme sans frein ni contrĂŽle, Ă©tayĂ© sur le monopole des connaissances interdites au vulgaire les a sĂ©duits, trompĂ©s et perdus. Car la Science est de droit divin : qui convoite ses trĂ©sors dans un espoir de prĂ©varication impunie, sâĂ©gare dans le souterrain qui mĂšne au secret caveau ; il sâenfonce dans les profondeurs sâil croit remonter, et la clartĂ© lointaine quâil prend pour la lampe du seuil nâest que le reflet anticipĂ© du bĂ»cher dâexpiation.
Cependant, la Nature, respectueuse du libre arbitre, a douĂ© lâhomme de moyens dâaction dans lâiniquitĂ© comme dans la vertu ; lâagent occulte obĂ©it Ă toute volontĂ©, sainte ou perverse, et si lâĂ©goĂŻste est inapte Ă la conquĂȘte du Vrai, du moins il peut le Mal.
Dans quelles circonstances le qualificatif de sorcier lui est-il applicable ? La question paraĂźt dĂ©licate. En effet, les ĂȘtres supĂ©rieurs qui font servir la science Ă des Ćuvres de tĂ©nĂšbres ne sont pas Ă proprement parler des sorciers, encore quâils accomplissent des rites maudits. Les bateleurs non plus ne sont pas forcĂ©ment des sorciers, quoique bien des bateleurs soient sorciers, ou si lâon prĂ©fĂšre, quoique bien des sorciers soient bateleurs.
Expliquons-nous. On sâaccorde assez communĂ©ment pour voir dans les sorciers dâaudacieux charlatans : je me garde bien de dire quâon a toujours tort. Lâhistoire est lĂ pour attester leur dĂ©gradation morale ; elle les fait voir trempĂ©s dans la lie des crimes, et de tels hommes ne peuvent ĂȘtre que des hypocrites. En mainte occurrence, Ă force de mystifier autrui, nâont-ils pas fini par se mystifier eux-mĂȘmes ? Je le veux bien.
Il messiĂ©rait pourtant de gĂ©nĂ©raliser cette hypothĂšse. Sâil y a des sorciers plus ou moins charlatans, il est sĂ»r que nul dâentre eux nâest un sceptique absolu. Leur dĂ©chĂ©ance intellectuelle et morale â les incitant Ă croire ce qui est absurde Ă lâexclusion des choses quâavoue la raison â nous fournit la clef de cette anomalie.
Parlons-nous du classique sorcier ? Du tĂ©nĂ©breux adepte de la magie noire ? Celui-lĂ croit Ă©perdument Ă sa propre puissance. Il nâa pas tort, car elle est rĂ©elle ; mais il nâen soupçonne pas plus la cause mĂ©diate quâil en discerne lâagent mĂ©diateur.
Parlons-nous des mĂ©diums et autres sorciers contemporains ? â Elle est sujette Ă des intermittences, cette Force quâils prĂ©tendent diriger et qui les mĂšne, dĂ©chaĂźner Ă leur grĂ© et qui les enchaĂźne Ă la fatalitĂ© de son propre mouvement : en sorte quâils se trouvent rĂ©duits au rĂŽle dâescamoteurs, dĂšs quâelle vient Ă leur manquer.
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