La lettre Pe par Gabri-el & Spartakus FreeMann. 

Quelques considérations sur la lettre Pe issues des anciens forums du Portail Kabbale en Ligne.

Note : certains auteurs l’Ă©crivent PĂ© HĂ©, ce qui fait passer sa valeur pleine Ă  85 au lieu de 81

Valeur : 80 – 800 (finale)

La premiĂšre reprĂ©sentation de cette lettre semble avoir Ă©tĂ© des lĂšvres, ce que tend Ă  confirmer le Sepher Raziel, qui nous dit : « Aleph est la lettre du larynx. Mem est la lettre du bout de la langue, au centre du palais. PĂ© est la lettre des lĂšvres ». On s’accorde cependant Ă  dire que PĂ© signifie « bouche » (ڀڐ). Son inverse, Af (ŚŚŁ) dĂ©signe le nez.

PĂ© est donc intimement liĂ© au systĂšme respiratoire. À ce sujet, les exercices de tsĂ©rouf nous enseignent que l’inspiration doit s’effectuer par le nez, alors que l’expiration ne peut se faire que par la bouche, vĂ©hicule du Verbe. De cette façon, les forces externes passent par le nez et non par la bouche, dont le rĂŽle est d’exprimer les forces internes.

« L’Ɠil voit, et la bouche exprime », nous dit Virya. Ayin, l’Ɠil, est en effet la lettre qui prĂ©cĂšde notre PĂ©. Et de continuer en citant Akiva : « Noun dĂ©signe celui qui est tombĂ© et qui cherche l’appui du samekh afin de se relever, dans son dĂ©sespoir, il tourne son Ɠil vers les cieux, tel un prisonnier qui appelle de sa bouche, PĂ©, pour que l’on dĂ©lie ses chaĂźnes et que s’ouvre la porte de la prison ». De mĂȘme, dans Exode 20 : 18 : « Or tout le peuple voit les voix et les flammes », Deut. 4 : 12 : « [
] vous ne voyiez pas d’images en dehors de la voix ? ». Le Saint, bĂ©ni soit-il, prononce la CrĂ©ation, et voit que cela est bon. « La connaissance est dissimulĂ©e dans la bouche » nous rappelle qu’il existe une Torah Ă©crite dont on prend connaissance par les yeux, mais aussi la Torah orale, qui se transmet par la bouche. Et c’est justement Ă  80 ans, la valeur guĂ©matria de PĂ©, que MoĂŻse transmet la parole du CrĂ©ateur.

PĂ©, comme toutes les lettres doubles, a deux prononciations (dure, PĂ© se prononce comme un « p ». Douce, elle se prononce comme un « f ») et deux significations. « Sept doubles : BGD KPRT (ڑڒړ Ś›Ś€ŚšŚȘ). Elles reposent sur la sagesse, l’opulence, la semence, la vie, la domination, la paix et la grĂące. » (Sepher Yetzirah 4 : 2). Ainsi, si PĂ© signifie la domination, elle reprĂ©sente Ă©galement son contraire, Ă  savoir la servitude. Virya laisse entendre qu’une lettre double prononcĂ©e avec son son dur renvoie Ă  sa « mauvaise » qualitĂ©, et son son doux Ă  sa « bonne » qualitĂ©. Il souligne ainsi trĂšs justement que toute chose a son contraire, sous peine de ne pas avoir d’existence, et que l’ensemble de la CrĂ©ation est un conflit plus ou moins Ă©quilibrĂ© de ces tensions opposĂ©es. Les exemples microcosmiques de ces combats internes et quotidiens ne manquent pas.

En tant que lettre double, PĂ© fait partie de ces sept lettres lourdes de symbolisme ; les sept jours, les sept annĂ©es du cycle sabbatique, les sept firmaments, etc. Le Kabbalistique dĂ©sireux d’approfondir ce domaine consultera Ă  profit le Sepher Yetzirah.

PĂ© signifie donc la domination, et dans son pendant nĂ©gatif, la servitude. Elle est Ă©galement en relation avec VĂ©nus (Mercure, selon certains), et soit le jeudi, soit le vendredi. Cette relation avec VĂ©nus nous en indique une autre avec la figure du Serpent, qui nous est confirmĂ©e par le Zohar 2b, alors que PĂ© s’avance devant le CrĂ©ateur pour plaider son mĂ©rite. À l’argument qu’elle dĂ©signe la DĂ©livrance ( PVRQNA ) et le Rachat ( PDVT ), le Saint, bĂ©nis soit-Il, rĂ©pond de la sorte : « Tu es digne, mais tu reprĂ©sentes Ă©galement la transgression (PShAy), et, de plus, tu te tiens comme le serpent, qui frappe en haut et revient vers son corps [
] » C’est Ă©galement un PĂ© qui dĂ©bute PZR, la « dispersion ». On retrouve une fois de plus le serpent Ă  la fois acteur de damnation et de dĂ©livrance. De plus, le PĂ©chĂ© premier Ă©tait aussi une question de domination (PĂ© doux) et de servitude (PĂ© fort) Ă  l’autoritĂ© divine, cristallisĂ©e par le questionnement du Serpent. Par la parole – et donc, la bouche -, l’homme est tombĂ©, et par cette mĂȘme bouche lui est offerte la possibilitĂ© soit de se disperser davantage, soit d’attendre la dĂ©livrance et le rachat. La bouche peut propager des paroles de division, soit des paroles d’union.

De ceci, le Sepher Raziel nous dit, en Ă©voquant le quatriĂšme fil du chĂąle de priĂšre, celui qui correspond Ă  la bouche : « […] de tous les mots Ă©crits, ne peine pas pour faire le serment, ne trompe pas par les mots ou en prononçant le nom, ne fais pas de serment [si] tu prononces des mensonges. De plus, les dents ne sont pas blanches dans la bouche, ou la langue articule ».

Pour ce qui est de la voie de l’Arbre symbolisĂ©e par PĂ©, les idĂ©es divergent. Les hermĂ©tistes la placent entre Netzach et Hod, tandis que Virya la place entre Gueburah et Hod. Aboth 5 : 24 nous dit que 80, la valeur de PĂ©, est l’ñge de la rigueur, aussi la tendance serait d’effectivement attribuer Ă  PĂ© la transition entre Gueburah et Hod.

Pé est formé par un Kaph, avec un Yod en son centre. Virya nous en dit que cela impose à la bouche de ne parler que de spiritualité (Yod). Ce Yod peut également représenter le Verbe créateur, le Yod primordial, épée rangée dans son fourreau de chair.

Kaph, autre lettre double, sujet d’une Ă©tude prochaine, a les sens vie et mort, et se trouve Ă  l’opposĂ© de PĂ©, entre ‘Hesed et Netzach. En me laissant aller Ă  une petite divagation ; lorsqu’Ă  la paume Kaph s’ajoute le Yod crĂ©ateur, on obtient la bouche PĂ©, instrument de CrĂ©ation, et vĂ©ritable Main de Dieu.

Il est Ă©galement dit que l’espace au milieu de PĂ© rĂ©vĂšle un Beth cachĂ©, qui renforce – s’il en est encore besoin – l’idĂ©e du pouvoir crĂ©ateur de la parole, et de la bouche PĂ©.

Et comme notre ami Spartakus nous le dira judicieusement ci-dessous, PĂ© se rapporte Ă  Binah comme nous l’indique le Sepher Yetzirah 1 – 9 : Â« […] La voix, le souffle et la parole sont l’Esprit Saint ». La voix est la force de crĂ©ation, pure et non encore articulĂ©e, c’est ‘Hockmah. La parole sera l’articulation de ce son, c’est Binah, et son vĂ©hicule est la bouche.

Voie de la Sagesse numĂ©ro 21 : Conscience dĂ©sirĂ©e et recherchĂ©e. Ce sentier est appelĂ© ainsi parce qu’il reçoit l’influx divin afin de dĂ©verser ses bĂ©nĂ©dictions sur toutes choses existantes.

Le flux de ce sentier s’exprime par la bouche et est associĂ© pour cela Ă  la lettre PĂ©. La pratique spirituelle constante accorde au mystique la puissance de la parole crĂ©atrice, et donne Ă  sa priĂšre une force ascensionnelle considĂ©rable (Virya, Kabbale extatique et Tserouf).

La lettre Pe, Gabri-el

Comme Gabri-el nous l’a dit dans son post, la lettre PĂ© ou FĂ© Ă©voque une bouche, autant par sa graphie que par son nom PĂȘh, en hĂ©breu, signifie « bouche Â». Et lĂ  est un secret de cette lettre, secret de la Shekhinah qui nous mĂšne vers notre texte bien aimĂ©, le Cantique des Cantiques ?

« Qu’il me baise des baisers de sa bouche » (Cant. Des Cant. 1:2) : ceci peut ĂȘtre interprĂ©tĂ© comme le souhait de la rĂ©vĂ©lation prophĂ©tique des secrets messianiques. Ces baisers sont donc les baisers d’en haut. Sa bouche, en hĂ©breu est piy, or dans le texte il est Ă©crit piyou. Ceci s’explique par le fait que cette invitation est adressĂ©e au Monde Ă  venir, c’est-Ă -dire Ă  Binah, voilĂ  pourquoi un HĂ© est ajoutĂ© Ă  piy. Ce HĂ© signifie que l’Amour du monde d’en bas, de la Sephira Malkhut, ne cherche que l’union avec le Monde d’en haut, la Sephira Binah. Le HĂ© est aussi l’association de l’Époux et de l’Épouse. Selon le Zohar du Cantique des Cantiques (p 83) : « Sa bouche, ici il faut rĂ©flĂ©chir. Si tu dis que les baisers se situent en haut, tout en haut dans l’Infini, parce qu’il est dit de maniĂšre enclose « qu’il me baise » et « de sa bouche”, et qu’ensuite le verset s’exprime ouvertement en disant « tes caresses”, il n’en n’est rien. Les baisers ne dĂ©pendent pas lĂ  de l’en haut, mais de la Femme avec son Époux. En fait, avant qu’ils ne soient entrĂ©s en contact l’un avec l’autre, le verset s’exprime de maniĂšre enclose. DĂšs qu’ils se sont rapprochĂ©s et se sont embrassĂ©s l’un l’autre par un attachement d’amour, Elle dit ouvertement « tes caresses », et il n’est pas Ă©crit « ses caresses », car ils sont joints ensemble dans l’amour, en une conjonction une, sans aucune sĂ©paration ».

« Qu’il me baise » : ceci est aussi l’attachement d’amour souffle Ă  souffle, ce souffle donnĂ© par la bouche. « De quatre souffles, viens souffle » (Ez. 37:9), quatre, car ce souffle est parfait car c’est celui qui procĂšde de l’amour d’un baiser, de la façon dont un baiser d’amour n’est donnĂ© que sur la bouche et qu’un souffle s’unit Ă  un souffle, si bien que chacun d’eux est constituĂ© de souffles, lui-mĂȘme et celui de son ami, tous ensemble formant quatre souffle. En hĂ©breu d’ailleurs, le mot pour « baiser » est « nashak » qui Ă©voque le fait de respirer ensemble.

Écoutons AndrĂ© Chouraqi dans son commentaire de sa traduction du Cantique : « Qu’il me baise ? Non pas un voeu, mais une certitude qui Ă©clate au premier mot de l’amante. Elle sait de science certaine que l’Amant la reconnaĂźtra, la dĂ©sirera, la caressera, l’embrassera ». « Bouche Ă  bouche : ainsi l’ĂȘtre se mire et se rĂ©alise dans l’ĂȘtre ».

Par ce court dĂ©veloppement, nous comprendrons aisĂ©ment que cette lettre soit l’Attribut de la Sephira Malkhut. Attribut de la communication, suggĂ©rĂ© par le nom mĂȘme de la lettre et par sa graphie, communication de Malkhut avec les autres Sephiroth en sa combinaison intime avec chacune d’elle. La bouche dĂ©signe la Loi orale (le Talmud) et, selon le Zohar : « Malkhut est la bouche, et on l’appelle la Torah Orale ». Le PĂ© reprĂ©sente donc la Loi que l’on acquiert de maniĂšre orale, par la bouche, en la rĂ©pĂ©tant afin de la dĂ©velopper. Graphiquement, le PĂ© est ornĂ© d’un Yod inversĂ© enclos dans l’espace intĂ©rieur de la lettre (et ce Yod symbolise la dent de la bouche), ce qui rappelle l’existence de la Hochmah cachĂ©e dans l’expression. Malkhut rĂ©sulte d’un Tsimtsoum tout comme le langage rĂ©sulte d’une contraction de la pensĂ©e. La Hochmah est l’humilitĂ© et la Malkhut ne peut ĂȘtre qu’humble dans son dĂ©sir de recevoir et cela confirme donc la prĂ©sence de la Hochmah dans la bouche. La correspondance de la Hochmah et de la dent nous est donnĂ©e par le fait que l’homme a trente-deux dents et que la Hochmah est une allusion aux 32 sentiers de la Sagesse, c’est-Ă -dire la Hochmah elle-mĂȘme.

La bouche crĂ©atrice peut aussi devenir destructrice et gĂ©nĂ©ratrice de chaos : Cela dĂ©coule de la similitude graphique qui existe entre le Khaf et le PĂ© qui rattache le premier Ă  la potentialitĂ© (Ko’ah en hĂ©breu) et la seconde Ă  la rĂ©alisation (Po’al en hĂ©breu).

Pour continuer avec les attributs de cette lettre, on peut la rattacher Ă©galement Ă  Binah, Binah est le huitiĂšme attribut Ă  partir du bas, et Binah est l’« entendement ». « Les jours de notre vie sont de soixante-dix ans, et avec rigueur, de quatre-vingts ans » (Psaume 90, verset 10), or, Binah est en relation avec la rigueur comme il est dit « Je suis Binah, Ă  moi la rigueur » (Proverbes 8:14), et cette relation peut se vĂ©rifier aisĂ©ment par rapport Ă  la lettre Mem (de valeur 40), qui dĂ©signe parfois la Sephira Binah et dont l’orthographe vocalisĂ©e (Mem – Mem final) est donc de 80. Enfin, PĂ© peut se rattacher Ă  Yessod dont la numĂ©ration est Ă©galement de 80. Nous sommes ici devant le deuxiĂšme secret de la lettre PĂ©. En effet, la Sephira Yessod prend l’influx de la Sephira Binah (Monde d’en haut) et le transmet Ă  la Sephira Malkhut. Et ce lien est bien fourni par le nombre 80 et la lettre PĂ© que l’on retrouve attachĂ©e Ă  chacune de ces Sephiroth.

Psaume CXIX – PHE

Prodigue tes témoignages ! ainsi mon ùme les garde.

L’Ă©closion de ton verbe illumine, il donne le discernement aux simples.

Ma BOUCHE bĂ©e, j’aspire : j’ai soif de tes ordres.

Fais-moi face, fais-moi grĂące, selon le jugement des amants de ton nom.

Et ta parole affermis mes pas, que tout le nĂ©ant ne m’asservisse.

RachĂšte-moi de la torture de l’homme, je garderai tes prĂ©ceptes.

Eclaire ton visage pour ton serviteur, Ă  tes lois, initie-moi.

Mes yeux ruissellent d’eaux, car ils n’ont pas gardĂ© la Torah.

La lettre Pe selon le Zohar :

« La lettre Pe se présenta devant Lui, disant « Maßtre des Mondes, que cela soit Ton désir de créer le monde avec moi, car la rédemption [purqana] que Tu as préparé pour le monde est signifiée par moi & sa délivrance [peduth, PDV »Th], ainsi suis-je parfaite pour créer le monde ».

Il lui dit « Tu conviens mais un pĂ©chĂ© cachĂ© [pesha’, PSh »A’] est signifiĂ© par toi, comme le serpent qui dĂ©truit, dont la tĂȘte est enrouĂ©e autour de son corps comme une personne coupable, sa tĂȘte inclinĂ©e et cependant sa main est tendue ». »

Plus sur le sujet :

La lettre Pe par Gabri-el & Spartakus FreeMann. Image par Les Hill de Pixabay

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